Réutilisation des eaux usées : Bio-UV lance une unité mobile de traitement pour les communes littorales

Spécialisée dans la désinfection de l’eau, la PME héraultaise Bio-UV va déployer cet été une solution innovante pour les municipalités littorales, leur permettant de traiter une partie des eaux sortant de leurs stations d’épuration à destination de petits usages urbains. Une première étape pour cette solution mobile qui pourrait, à terme, trouver des débouchés dans l’industrie sur des volumes plus conséquents.
Cécile Chaigneau
Bio-UV lance CUBIQ, une unité mobile de traitement des eaux usées qui a vocation à être installées à la sortie des stations d'épuration pour ajouter un traitement supplémentaire rendant l'eau réutilisable pour de petits usages urbains.
Bio-UV lance CUBIQ, une unité mobile de traitement des eaux usées qui a vocation à être installées à la sortie des stations d'épuration pour ajouter un traitement supplémentaire rendant l'eau réutilisable pour de petits usages urbains. (Crédits : Bio-UV)

L'entreprise héraultaise Bio-UV (160 salariés), basée à Lunel et cotée en bourse, est spécialisée dans la désinfection de l'eau par ultraviolets, électrolyse de sel, ozone ou processus d'oxydation avancée. Ses principaux marchés sont les eaux de piscine (son activité historique), les eaux de process dans l'industrie, la réutilisation d'eaux usées traitées et l'aquaculture, ainsi que le traitement des eaux de ballast des navires. En 2023, son chiffre d'affaires était de 43,1 millions d'euros (50% à l'export), dont 30 millions d'euros sur ses activités terrestres et 13 millions d'euros sur ses activités maritimes.

En 2023, Bio-UV avait enregistré une croissance soutenue sur les marchés du traitement des eaux usées municipales et industrielles, « une croissance de 50%, avec un objectif de croître d'au moins 50% en 2024, si possible doubler l'activité, principalement sur la France mais aussi l'Europe », annonçait Laurent-Emmanuel Migeon, le PDG de Bio-UV en janvier dernier, soulignant que « sur le traitement et la réutilisation des eaux usées, les systèmes vendus par Bio-UV en 2023 représentent l'équivalent du traitement de l'eau d'une ville comme Paris ».

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« Plug and play »

C'est en s'appuyant sur son expertise (l'entreprise existe depuis 35 ans), notamment dans son activité dans le secteur maritime auquel elle propose « des solutions totalement intégrées », précise le dirigeant (800 systèmes vendus en cinq ans), que la PME surfe pour lancer une nouvelle solution clé-en-main de REUSE : un système de traitement complet mobile, baptisé CUBIQ, « facile à mettre en œuvre », pour traiter les eaux usées par technologie ultraviolet afin d'obtenir une qualité d'eau de classe A ou B pouvant être réutilisée selon les réglementations sanitaires en vigueur. Ce système « plug and play », monté sur châssis et incluant une pompe, un filtre et un réacteur ultraviolet, a vocation à être installé en extérieur, à la sortie des stations d'épuration des eaux usées (STEP) existantes.

« CUBIQ vient en complément pour permettre aux collectivités d'amener l'eau à réutiliser au point d'utilisation au lieu de la rejeter à la mer, explique Laurent-Emmanuel Migeon. En sortie de STEP, la collectivité installe CUBIQ, l'eau traitée est gardée dans un système de stockage et elle sera acheminée par des camions jusqu'au point d'utilisation. »

La solution proposée par Bio-UV peut traiter 3 à 5 m3 d'eau par heure, soumis à un traitement UV dont la puissance change en fonction de la qualité de l'eau en sortie de station d'épuration. Laurent-Emmanuel Migeon « une consommation d'énergie faible, moins de 600 euros par an pour 1.000 heures de fonctionnement ».

Les eaux traitées issues du CUBIQ auront vocation à être réutilisées pour le remplissage de laveuses de voirie ou de camions d'hydrocurage, pour le nettoyage direct des équipements de la stations d'épuration ou pour du petit arrosage urbain.

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Technologie, études et financement

CUBIQ sera disponible dès cet été, à l'achat ou à la location. Bio-UV cible les communes littorales, « celles qui rejettent l'eau des stations d'épuration à la mer, pour qui l'eau est donc perdue, et principalement dans les territoires qui souffrent de pénurie d'eau, comme les régions Occitanie et PACA », indique le dirigeant.

La France ne recycle que 1% de ses eaux usées, contre 14% pour l'Espagne par exemple. En août 2023, alors que la sécheresse asséchait une grande partie du territoire, un décret a été publié au Journal officiel prévoyant « la simplification de la procédure d'autorisation pour le recyclage des eaux usées traitées » pour le nettoyage des voiries ou l'arrosage de certains espaces verts. En mars 2023, Emmanuel Macron avait d'ailleurs fixé l'objectif d'atteindre 10% d'ici à 2030, soit « réutiliser 300 millions de mètres cubes par commune », indiquant que 1.000 projets seraient lancés en cinq ans dans ce but.

Une simplification pas encore optimum... Elle requiert notamment des municipalités des études approfondies avant la mise en œuvre de toute solution de REUSE.

« Nous voulons offrir une solution complète avec la technologie, les analyses et études de besoins requises par la préfecture et l'ARS et, comme nous nous adresserons plutôt à des collectivités en régie municipale, nous voulons aussi apporter de l'ingénierie de financement, détaille Laurent-Emmanuel Migeon. Pour une commune, cela nécessitera un investissement autour de 30.000 euros, 70.000 euros si on ajoute les analyses et les études, auxquels s'ajoutera un coût de fonctionnement en-dessous de 50 centimes du m3. »

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Cibler de plus gros volumes d'eau

Quant aux ambitions commerciales de Bio-UV pour CUBIQ, l'entreprise étant cotée, Laurent-Emmanuel Migeon reste volontairement flou : « Nous voulons prendre une part de marché raisonnable, pas forcément être les leaders mais un acteur significatif. Disons que nous visons la centaine d'unités dans les trois ou quatre prochaines années ». Selon lui, les gros opérateurs de l'eau ont également des solutions mais restent encore discrets, notamment sur les questions d'efficience et de respect de la réglementation.

Au-delà du lancement de CUBIQ pour cet été, Bio-UV planche déjà sur la phase 2, celle qui s'intéressera à d'autres enjeux que les enjeux municipaux, à savoir les problématiques industrielles par exemple, ou encore celles des campings. Des besoins qui nécessiteront le traitement de volumes d'eau plus conséquents que les capacités de CUBIQ.

« En 2025, nous ciblerons sur une géographie plus large et des applications différentes, annonce déjà Laurent-Emmanuel Migeon. Il s'agira d'aller chercher des volumes de 10 ou 20 m3 pour d'autres applications, mais la réglementation peut être différente dans ces secteurs et imposer de traiter la problématique biologique mais aussi les problématiques physico-chimiques. »

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Cécile Chaigneau

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