Eclairage public : comment les collectivités héraultaises s’emparent des enjeux de sobriété

Si depuis plus de 40 ans, les villes et métropoles avaient tendance à multiplier les points lumineux, une approche plus sobre et plus respectueuse de la biodiversité se développe. Retour d’expérience avec des experts et collectivités de l’Hérault, qui s'étaient réunis en juin dernier chez Technilum, entreprise biterroise spécialisée dans l’éclairage urbain.
En 2019, la commune de Montady, à l'ouest de Béziers, a lancé une expérimentation en dotant un tronçon de la RD11 qui traverse la ville d'un éclairage intelligent : la route s'éclaire à l'approche d'une voiture avant de retomber dans la pénombre.
En 2019, la commune de Montady, à l'ouest de Béziers, a lancé une expérimentation en dotant un tronçon de la RD11 qui traverse la ville d'un éclairage intelligent : la route s'éclaire à l'approche d'une voiture avant de retomber dans la pénombre. (Crédits : Technilum)

« Éclairer où il faut, quand il fait et comme il faut. » Ce leitmotiv clair était mis en avant par Xavier Wojtaszak, chargé de mission Territoires durable auprès de l'Ademe Occitanie, lors du colloque Rencontres actives pour des villes durables et désirables. Cet événement était organisé par l'entreprise Technilum, spécialiste du mobilier urbain d'éclairage, installé au Domaine de Lézigno près de Béziers (Hérault).

Lors des échanges, les participants ont discuté des nouveaux enjeux d'éclairage pour une ville durable. Car depuis plusieurs décennies, les collectivités ont multiplié les points lumineux. Or aujourd'hui, cette pratique est largement remise en question, alors que l'on a identifié les problèmes liés à la pollution lumineuse ou à l'impact des lumières artificielles sur la biodiversité. A ces enjeux s'ajoute celui de la crise énergétique et du changement climatique qui imposent des économies d'énergie.

« Et il faut aussi désormais considérer le contexte géopolitique, les prix de l'énergie et les difficultés d'approvisionnement en matières premières », précise Agnès Jullian, CEO de Technilum.

Des données nouvelles qui « complexifient » les projets, mais donnent aussi des arguments à des entreprises comme Technilum, qui fabrique tous ses mâts lumineux dans ses ateliers de Lézigno, avec 75% d'aluminium recyclé. Les solutions sont ensuite proposées aux collectivités, qui cherchent désormais à réviser leur politique d'éclairage en fonction de ces critère environnement, sociaux et économiques.

Un équilibre entre usage et nuisance

« Pour réussir une approche plus sobre ou plus intelligente, il faut initier en amont une réflexion sur les besoins réels des usagers et penser aux évolutions sociétales, notamment pour les insectes de la biodiversité que l'on sait désormais très perturbés par les éclairages, détaille Xavier Wojtaszak. C'est un équilibre qui peut être délicat à trouver. La technologie LED par exemple, est très peu consommatrice d'énergie, et s'impose ces dernières années dans les villes. Mais sa lumière bleue est assez proche de la lumière du jour, ce qui peut perturber les biorythmes. Plusieurs solutions s'offrent alors : l'installation de capteurs mais aussi la diminution de la puissance ou l'extinction totale du point lumineux en milieu de nuit. Tout va dépendre des usages. »

Avec une approche technologique plus intelligente, notamment grâce aux capteurs, les points lumineux peuvent aussi mesurer d'autres données comme un flux de circulation. La politique d'éclairage devient alors un élément de smart city, et un support d'informations pour les décideurs.

« Ces outils d'ingénierie territoriale peuvent être une clé pour la réussite d'objectifs collectifs, poursuit Cécile Maisonneuve, spécialiste énergie-climat à l'Institut Montaigne. Mais c'est là où l'on peut retrouver des différences entres les grandes et les petites villes : les métropoles sont souvent plus aguerries à l'ingénierie de projet et elles ont aussi les moyens de se faire accompagner. Une logique transversale s'impose dans les administrations, qui ne peuvent plus penser les enjeux d'éclairage, de transports ou encore de sécurité de façon déconnectée. »

L'exemple de Montpellier

Dans la Métropole de Montpellier par exemple, un nouveau plan lumière est en cours de rédaction et devrait être finalisé pour le dernier semestre 2022, alors que le dernier plan daté de 1983...

« Il était temps de revoir ce plan car aujourd'hui nous avons grandement évolué dans nos réflexions, explique Bruno Paternot, délégué à l'esthétique lumineuse et à l'ambiance sonore de la ville de Montpellier. Sur les routes par exemple, nous savons que les deux phares d'une voiture suffisent à éclairer un danger. On change donc de paradigme et on se concentre sur les besoins en éclairage des mobilités actives, en lien avec notre politique de transport. »

La Métropole compte aujourd'hui 70.000 points lumineux dont 35.000 dans la ville-centre. L'objectif, selon Bruno Paternot, serait de réduire ces chiffres, tout en restant au plus proche des besoins : « Avec les LED peu chères et faciles à entretenir, les points lumineux ont eu tendance à augmenter en France, mais il faut réduire la pollution lumineuse qui a des effets sur le bien-être du vivant. On peut aussi travailler plus subtilement en jouant sur la couleur de la lumière, son intensité, sa durée ».

L'expérimentation de Montady

En milieu rural, les communes n'ont pas les moyens des Métropoles mais peuvent se réunir autour de syndicats d'énergies pour mutualiser les moyens et les réflexions. Sur ces territoires, les Départements sont aussi une collectivité incontournable pour lancer des projets et des expérimentations.

C'est le cas sur la commune de Montady à l'ouest de Béziers, où un tronçon de la RD11 qui traverse la ville est désormais doté d'un éclairage intelligent. La route s'éclaire à l'approche d'une voiture avant de retomber dans la pénombre. Initié en 2019, le projet était une première en France, et une expérimentation voulue par le Conseil départemental de l'Hérault.

« En plus de l'éclairage intelligent, nous avons mis une chaussée plus claire qui réfléchit mieux la lumière, détaille Philippe Vidal, conseiller départemental délégué à l'aménagement du territoire et maire de Cazouls-lès-Béziers. Nous ferons le bilan précis de l'installation l'année prochaine, mais nous estimons déjà les économies d'énergies à 80%. »

Sur sa commune de Cazouls-lès-Béziers, Philippe Vidal avait aussi fait office de précurseur en initiant l'extinction des points lumineux sur certains endroits de sa commune en cœur de nuit, dès 2008. Une expérience qui continue encore aujourd'hui et place la commune parmi les 2% des villes héraultaises qui pratiquent l'extinction de nuit. Un chiffre encore faible, recensé par le syndicat Hérault Énergie en 2020.

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