Fermeture de Schneider Electric à Lattes : les élus mobilisés mais une affaire déjà pliée ?

Depuis la mi-septembre, les 80 salariés de l’usine Schneider Electric de Lattes, à côté de Montpellier, savent que la direction du groupe a décidé de fermer le site pour délocaliser l’activité. Il y a deux jours, le président de la Métropole de Montpellier et le maire de Lattes ont adressé un courrier au ministre de l’Économie. Mais à Lattes, les négociations autour du PSE sont en cours et l’affaire semble mal engagée…
Cécile Chaigneau
Le groupe Schneider Electric devrait fermer l'une des deux usines de Lattes, dans l'Hérault, à la mi-2021.
Le groupe Schneider Electric devrait fermer l'une des deux usines de Lattes, dans l'Hérault, à la mi-2021. (Crédits : Amit Dave)

« Ici, on produit des ampoules à vide pour disjoncteurs et contacteurs ainsi que des disjoncteurs, et c'est aussi là que se trouvent les services après-vente des équipements en fin de vie », rappelle Anne Bonnel, déléguée syndicale CGT chez Schneider Electric à Lattes, près de Montpellier, où le groupe compte deux usines.

Le 16 septembre dernier, la direction du groupe annonçait qu'elle allait fermer l'une de ces deux usines. Quelque 80 salariés sont concernés. Et sont d'autant plus amers que cette fermeture n'est pas la première dans l'Hérault. L'histoire récente de l'industriel, qui a compté jusqu'à 1.200 salariés dans le département, est faite de plans de restructuration et de fermetures...

« Nous, on était Areva jusqu'en 2010, quand Schneider Electric a racheté la branche Transmission et Distribution d'Areva, rappelle Anne Bonnel. Schneider Electric a créé la filiale Schneider Electric Énergie France pour intégrer ces usines, et jusqu'en 2013, ils s'étaient engagés à les conserver et à conserver les emplois. En 2013, ils ont fermé l'usine de la Pompignane à Montpellier (300 emplois, NDLR). En 2015, ils ont licencié des gens à Fabrègues, puis en 2016, ils ont fermé l'atelier éphémère de Mudaison et rapatrié les salariés à Lattes. En 2018, c'était la fermeture définitive de Fabrègues, qui avait compté jusqu'à 300 salariés. »

Délocalisation à Aubenas, Mâcon, Grenoble et... en Inde

« La direction a annoncé une réorganisation d'une partie de son activité de production moyenne tension en France en raison d'une forte baisse d'activité depuis plusieurs années, explique la porte-parole de Schneider Electric à La Tribune le 24 novembre. Le projet vise à consolider les activités industrielles du groupe à travers des pôles de référence compétitifs pour la France et pour l'Europe... Ce plan prévoit l'arrêt des sites de Saumur et de Lattes au 2nd semestre 2021. »

Anne Bonnel s'indigne : « La direction nous parle d'un déficit de 500 000 € qu'elle justifie par l'entretien des bâtiments, ce qui fait que le site ne serait pas rentable. Mais Schneider Electric a fait 27,4 milliards d'euros de bénéfices l'an dernier dans le monde ! En fait, ils veulent rapatrier de l'activité sur des usines historiques qui ont moins de travail. Pour les ampoules à vide, une partie de la production irait sur Aubenas et une autre en Inde, c'est inscrit dans le PSE... Pour les disjoncteurs, l'activité partirait sur Mâcon et le SAV à Grenoble ».

Interrogée, la direction du groupe confirme bien Mâcon, Aubenas et Grenoble - plus exactement Fontanil-Cornillon dans le centre de modernisation des équipements - mais ne dit rien sur l'Inde...

Dans les rangs salariés de Lattes, où on n'a jamais arrêté de travailler malgré la crise Covid, Anne Bonnel observe « une grosse colère et de la résignation » : « Pour certains, c'est la 5e fois qu'on les bouge... Ici, la moyenne d'âge se situe entre 52 et 55 ans, beaucoup de salariés ne sont pas mobiles ».

L'intersyndicale a interpellé le maire de Lattes Cyril Meunier, le président de la Métropole de Montpellier Michaël Delafosse, et la députée Muriel Ressiguier (LFI). Les salariés aimeraient encore croire que le courrier adressé par Cyril Meunier et Michaël Delafosse le 18 novembre au ministre de l'Économie Bruno Le Maire, pourrait influer le cours des choses.

« Comme Michaël Delafosse vient juste d'être élu, on va lui faire confiance... », plaide Anne Bonnel.

Ne pas considérer que c'est une fatalité

Les deux élus sont d'ailleurs venus sur le site pour assurer les salariés de leur soutien

« J'ai malheureusement vu des gens résignés, nous confie Michaël Delafosse. Ils produisent notamment des ampoules à vide pour les centrales nucléaires, c'est à dire pour une industrie relevant de la sécurité nationale, et on va aller les produire en Inde ?! Je veux bien entendre des discours sur le patriotisme économique mais si demain on est dans une situation de vulnérabilité, on le regrettera... Veut-on poursuivre cette fuite en avant ? »

Sur la question du potentiel d'influence et de contrainte des pouvoirs publics sur le groupe industriel, l'édile montpelliérain ne veut pas se résoudre à l'impuissance : « Cyril Meunier a dit que si Schneider Electric veut un jour vendre pour faire du logement, ce sera non ! Ça restera un site industriel. On doit défendre nos savoir-faire au niveau national. Schneider Electric est une entreprise historiquement française, que l'État et les collectivités ont accompagnée. J'invite l'État à ne pas considérer que c'est une fatalité. ».

Dans leur courrier, MM. Delafosse et Meunier demande au ministre d'interpeller Schneider Electric « sur leur sens des responsabilités et de la solidarité nationale dans cette période charnière de l'économie française, et que l'entreprise s'engage à reconsidérer son positionnement en faveur du maintien de l'emploi et de la production en France ».

L'heure est aux négociations, avec en ligne de mire une fermeture au 1er juillet 2021.

« Jusqu'en décembre, nous avons toutes les semaines une journée de négociation, c'est à dire encore trois à venir, précise Anne Bonnel. Et fin janvier, accord ou pas, le PSE devra être bouclé. »

Cécile Chaigneau

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 1
à écrit le 25/11/2020 à 22:04
Signaler
et ça continue, le grand chef a dit qu'il va relocaliser.... et son petit LeMaire a dit qu'il le ferait. Renault ferme Flins car un site qui ne produit plus de voiture neuve est un site fermé dans l'automobile. Schneider, maintenant. La Covid est une...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.