Mobilités : comment Seven produit de l’hydrogène vert pour alimenter ses stations multi-énergies

Dans un contexte énergétique bouleversé par une géopolitique mondiale à cran depuis le début du conflit en Ukraine, toutes les alternatives à même d’affranchir les pays des énergies fossiles retrouvent de nouvelles marques d’intérêt… L’entreprise montpelliéraine Seven, déjà positionnée sur le bioGNV local, pousse son projet industriel plus loin en développant un procédé de production de BioH2 (hydrogène renouvelable) à partir de biogaz, destiné aux mobilités lourdes.
Cécile Chaigneau
Le procédé VaBHyoGaz développé par Seven est le premier procédé de production de BioH2 (hydrogène renouvelable) à partir du biogaz.
Le procédé VaBHyoGaz développé par Seven est le premier procédé de production de BioH2 (hydrogène renouvelable) à partir du biogaz. (Crédits : Seven)

La startup montpelliéraine Seven annonce, le 15 juin, l'industrialisation prochaine de son prototype VaBHyoGaz, premier procédé de production de BioH2 (hydrogène renouvelable) à partir du biogaz.

En 2006, Seven, en partenariat avec les Mines Albi et TRIFYL, le syndicat de valorisation des déchets ménagers du Tarn, avait lancé un pilote qui transformait le biogaz ISDND (installation de stockage de déchets non dangereux) de Labessière-Candeil en bio-hydrogène. Depuis le début du printemps 2022, un démonstrateur VaBHyoGaz est en
 phase expérimentale chez Veolia pour
 une période de six mois : la station d'épuration d'Hyères, à l'Almanarre,
 s'est
 associée à la Métropole Toulon Provence 
Méditerranée pour tester ce procédé de
 production d'hydrogène vert à partir de boues
 d'épuration issues des eaux usées d'Hyères
 et de Carqueiranne. Elle produit de l'hydrogène vert qui alimente des véhicules utilitaires à hydrogène de la métropole toulonnaise.

Pour Seven, cette solution d'économie circulaire fait partie d'un mix énergétique local à déployer partout en France.

« L'hydrogène, qui apparaît comme "LA" solution d'avenir pour décarboner le transport, est aussi pointé du doigt pour son impact environnemental lorsqu'il est issu de ressources fossiles, parce que sa production est issue des hydrocarbures et que son transport aggrave le bilan carbone, rappelle Jean-Michel Richeton, P-dg de Seven. Nous avons choisi de changer la donne sur le marché en déployant un hydrogène vert issu d'un procédé inédit, le VaBHyoGaz. »

« L'histoire nous donne raison »

Fondée en 2017 à Montpellier, Seven promeut un modèle territorial de production/distribution de carburants verts en circuit-court. Elle développe un réseau de stations bioGNV destinés à approvisionner les mobilités lourdes. A ce jour, elle en exploite 14, dont dix en Occitanie, trois en PACA et une en Nouvelle-Aquitaine. Situées sur des lieux de passage ou des zones d'activités logistiques notamment, elles distribuent du bioGNV produit dans la région (par exemple dans le Tarn pour l'Occitanie).

D'autres stations sont en construction ou en développement ailleurs en France, notamment dans les Hauts-de-France où la startup a remporté un nouveau marché de dix stations.

« Ce carburant intéresse aujourd'hui les collectivités locales mais aussi les PME et les grands groupes, explique Jean-Michel Richeton Les ZFE (zones à faibles émissions, NDLR) sont progressivement mises en place et tout le monde cherche des solutions... Il n'y avait jusqu'à présent que les aspects environnementaux qui amenaient les uns et les autres sur notre filière biogaz en circuit court. Or cela fait deux ans que Seven prône de passer au gaz local pour s'affranchir du pétrole... Aujourd'hui, malheureusement, l'histoire nous donne raison. On sent une vraie prise de conscience, et la méthanisation, qui était confidentielle, est devenue plus grand public et intéresse de plus en plus. »

Dans le contexte mondial chahuté par les désordres géopolitiques entre l'Ukraine et la Russie, le secteur de l'énergie est en effet l'un des plus affectés. Le biogaz ou l'hydrogène renouvelables s'affichent comme des alternatives considérées de près.

« L'Europe vient de statuer sur l'arrêt des moteurs thermiques à horizon 2035 donc il reste les moteurs électriques et à hydrogène, et cette dernière est mieux adaptée aux mobilités lourdes en termes de recharge et d'autonomie », ajoute le dirigeant.

Cultures agricoles énergétiques

Techniquement, le procédé VaBHyoGaz repose sur la méthode du vaporeformage (ou reformage à la vapeur) de biogaz, explique Seven. Il permet de produire un BioH2 « à la fois durable, écologique et rentable » à partir de déchets organiques (ordures ménagères, déchets agricoles...) ou de cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE).

« Le procédé VaBHyoGaz peut intéresser tous les producteurs de biogaz qui ont des productions excédentaires ou encore qui arrivent en fin de contrat de cogénération, indique Jean-Michel Richeton. Et nous visons à créer nos propres unités de production à partir de cultures énergétiques de la catégorie des CIVE. Ce ne sont pas des cultures qui se substitueraient aux cultures alimentaires, bien sûr... Ce sont des plantes (il ne précise pas lesquelles car encore au stade de la R&D, ndlr) que l'on peut planter entre deux cultures et qui ont pour propriété de régénérer les sols ou de piéger les nitrates. On veut que ça profite au tissu agricole et on est en train de se regrouper avec des agriculteurs autour de ce projet. »

Transports et industrie

Le dirigeant souligne l'intérêt du VaBHyoGaz pour des transports plus durables et pour le secteur de l'industrie. A terme, Seven prévoit d'ailleurs d'intégrer le procédé VaBHyoGaz dans ses stations multi-énergies biogaz-électricité-bioH2 afin de « favoriser le verdissement durable de la mobilité ».

« L'industrialisation et la modularité de la gamme des produits VaBHyoGaz - de 100 à plusieurs milliers de kg d'hydrogène par jour - permettent de répondre dès à présent aux besoins émergents de la mobilité hydrogène aux niveaux national et international tout en développant des unités de capacités adaptées aux besoins croissants de ces dix prochaines années, affirme Jean-Michel Richeton. Par ailleurs, l'industrie est aujourd'hui consommatrice de plusieurs dizaines de milliers de tonnes d'hydrogène par an. Grâce à Seven, les industriels désireux de réduire les impacts liés à leur activité auront accès à une offre d'approvisionnement en hydrogène renouvelable à un prix vraiment compétitif. »

Retrofit de véhicules lourds

Pour financer l'industrialisation de ce procédé de production de BioH2 à partir de biogaz, Seven prépare plusieurs augmentations de capital et Jean-Michel Richeton souligne être « suivi par les banques ».

Seven Occitanie, dont le siège est à Montpellier, a décidé de s'inscrire sur toute la chaîne de valeur à travers la création de plusieurs filiales. La holding (basée à Nice) compte ainsi aujourd'hui GS Industrie (construction et maintenance des infrastructures), Hy-SET (développement de solutions innovantes de production d'hydrogène vert), et Seven Motors (en partenariat avec le groupe Ippolito), créée il y a un an pour porter le retrofit de véhicules lourds diesel/hydrogène.

Au total, Seven annonce un chiffre d'affaires de 12 millions d'euros. L'entreprise emploie 25 personnes, un effectif qu'elle prévoit de doubler en 2022 : « Nous avons besoin de techniciens pour opérer nos stations, de forces de vente, et de compétences pour structurer la partie administrative et financière », précise le dirigeant.

Cécile Chaigneau

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.