A Béziers, l’Etat et la Région consolident l’écosystème de la future gigafactory Genvia

Anticiper, synchroniser, favoriser les synergies. En résumé : préparer le terrain. C’est l’ambition de l’impulsion donnée par la création de EDEN (Ecosystème Durable et Energies Naturelles), un comité dont la vocation est d’embarquer tout l’écosystème biterrois associé à la dynamique industrielle de la future gigafactory Genvia (électrolyseurs pour la production d’hydrogène vert décarboné). EDEN était officiellement lancé le 30 septembre.
Cécile Chaigneau
Le 30 septembre, le comité EDEN a été lancé sur le site de Genvia, à Béziers, en  présence de Florence Lambert (présidente de Genvia), Hugues Moutouh (préfet de l'Hérault), Carole Delga (présidente de la Région Occitanie) et Luc Mas (directeur du site de Cameron Schlumberger).
Le 30 septembre, le comité EDEN a été lancé sur le site de Genvia, à Béziers, en présence de Florence Lambert (présidente de Genvia), Hugues Moutouh (préfet de l'Hérault), Carole Delga (présidente de la Région Occitanie) et Luc Mas (directeur du site de Cameron Schlumberger). (Crédits : Cécile Chaigneau)

Afin de soutenir la production de toutes les briques technologiques essentielles à la construction d'une filière de l'hydrogène, l'Etat français mettra 2,1 milliards d'euros sur la table (entraînant 3,2 milliards d'euros d'investissements privés additionnels) pour financer les dix gigafactories dédiées à l'hydrogène bas carbone qui vont s'implanter en France. C'est ce qu'a annoncé la Première ministre Elisabeth Borne le 28 septembre, depuis le site de l'équipementier Plastic Omnium, dans l'Oise.

Ces dix sites, sélectionnés dans le cadre d'un PIIEC (Projet important d'intérêt européen commun), sont répartis dans sept régions, dont deux en Occitanie : Alstom à Toulouse et Genvia à Béziers. Née d'un partenariat public-privé (Cameron-Schlumberger, le CEA Grenoble, Vinci Construction, Vicat et la Région Occitanie via l'AREC Occitanie), Genvia  porte l'industrialisation à grande échelle de la technologie innovante d'électrolyseurs permettant la production massive et à des coûts compétitifs d'hydrogène vert décarboné, une technologie de rupture initialement développée par le CEA Grenoble.

« Dérisquer une industrie stratégique »

Florence Lambert, la présidente de Genvia, était aux côtés de la Première ministre mercredi... Une nouvelle pierre apportée à l'édifice industriel biterrois en devenir. Car c'est depuis le site industriel historique de l'entreprise biterroise Cameron, spécialisé dans les équipements pour les filières gazière et pétrolière et rachetée par le groupe Schlumberger en 2015, que se déploie progressivement la future gigafactory Genvia.

« Dans un contexte de crise énergétique sans précédent, l'idée est de faire coïncider cette urgence avec l'opportunité industrielle que représente Genvia en termes de souveraineté énergétique et industrielle, souligne Florence Lambert. L'hydrogène est une clé de voute et ce sera probablement le seul outil de décarbonation de nos industries. L'alignement des acteurs fera la différence et peut permettre de dérisquer une industrie stratégique qui va prendre du temps. D'où la création du comité EDEN pour synchroniser et adresser des sujets comme le foncier, les compétences, les infrastructures, l'innovation et l'attractivité. »

« Le paradis de la tech »

Le 30 septembre, l'Etat et la Région Occitanie réunissaient l'ensemble des partenaires impliqués pour le premier comité de coordination territorial d'EDEN, acronyme de "Ecosystème Durable et Energies Naturelles". Ce qui faisait dire au préfet de l'Hérault, Hugues Moutouh, qu'il s'agissait de lancer « le paradis de la tech dans le biterrois ».

Avec Genvia, le bassin d'activité biterrois devient un pôle central pour les acteurs associés à cette dynamique : entreprises, sous-traitants, centres de formation, startups ou organismes de recherche. L'objectif d'EDEN est de créer une synergie vertueuse de toutes les forces vives du territoires autour du vaisseau-amiral Genvia, afin de préparer le terrain, d'accompagner la montée en puissance de l'écosystème régional et à terme, de garantir la réussite industrielle du projet.

« J'ai toujours affiché ma volonté de renforcer la souveraineté industrielle et énergétique de la région, déclare Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, qui s'est dotée d'un plan Hydrogène vert de 150 millions d'euros sur la période 2019-2023. Sur le Biterrois, il existe une tradition industrielle et c'est essentiel pour l'acceptation et la question de la formation. Ce projet permet de redonner une capacité à ce territoire... »

« Béziers, dans l'Hérault, est le territoire le plus industriel du département, celui qui a la culture et les formations, ajoute le préfet. EDEN est un cluster de hautes technologies, et l'idée, c'est d'impulser. Tout le monde y croit car c'est un modèle qui a fait ses preuves dans le monde entier, par exemple la Silicon Valley : la concentration de talents, de compétences, de projets, etc. produit de la valeur ajoutée pour le territoire et le pays. »

« EDEN, c'est un système d'anticipation »

Qui fera donc partie de EDEN ? Pour le moment, pas de liste précise.

« Tous les acteurs industriels, de l'innovation ou de la formation du territoire, précise Luc Mas, directeur du site de Cameron Schlumberger. On ne va rien réinventer. L'objectif, c'est de partager une vision à 10 ou 15 ans, de faire savoir, de donner de la cohérence à toutes les initiatives qui ont déjà été prises. Tout le monde peut en faire partie. »

Parmi les premiers concernés par exemple, les adhérents de ITS Fusion, entreprises de la supply-chain industrielle du pétrole situées sur le territoire biterrois autour de l'industriel Cameron. Mais aussi des équipes universitaires de Toulouse ou de Montpellier.

« Alstom pourrait rentrer dans Eden pour optimiser le train à hydrogène, notamment parce qu'il faudra des trains plus légers », ajoute Carole Delga.

Florence Lambert promet « une gouvernance agile, sans structure juridique mais avec des réunions de travail tous les six mois ».

Luc Mas illustre les ambitions d'EDEN : « Recruter, c'est très compliqué aujourd'hui, il faut donner du sens et séduire. Si on ne fait rien, on n'y arrivera pas. Donc il faut anticiper sur ce point, comme sur celui du foncier ».

« EDEN, c'est un système d'anticipation : par exemple, les recrutements dans cinq ans se jouent aujourd'hui ! Il faut créer une chaîne de l'optimisation des missions de chacun, il faut que toutes les innovations se créent sur place, et créent des emplois et de la valeurs ajoutée ici », renchérit la présidente de Région, qui annonce qu'elle se rendra à la Silicon Valley pour « s'inspirer de l'ouest américain » lors de son prochain déplacement aux Etats-Unis en début d'année prochaine.

Une première ligne-pilote automatisée

Genvia bénéficiera de 200 millions d'euros via le plan de Relance, «  2,5 millions d'euros à court terme et 4,3 millions d'euros de l'Ademe pour accompagner le lancement », rappelle le représentant de l'Etat.

Le premier acte de cette industrialisation a été la création d'un atelier-pilote sur le site de Cameron entre août et novembre 2021, afin de valider le transfert de technologie. Une trentaine de salariés de Cameron ont été mis à disposition de Genvia. Florence Lambert annonce que la première ligne-pilote automatisée va être lancée dans quelques jours, avec aujourd'hui une centaine de salariés qui travaillent sur le site, et ajoute : « Nous voulons doubler à horizon 2025 et nous avons pour ambition d'être à la gigafactory autour de 2030 avec 500 emplois ».

Selon les annonces initiales, une montée progressive en puissance devrait permettre d'atteindre les 1.000 électrolyseurs par an à horizon 2023, et une pleine capacité de production en 2024, avec douze lignes de production.

Les systèmes modulaires (électrolyseurs et équipements annexes) qui sortiront de la gigafactory biterroise ont vocation à équiper les gros industriels, à commencer par Schlumberger mais aussi le cimentier Vicat, EDF ou ArcellorMital en Lozère. Et pourquoi pas la future usine de production d'hydrogène de Port-la-Nouvelle, portée par la société de projet Hyd'Occ (Qair Premier Element et AREC).

«Nous souhaitons accélérer pour bâtir un écosystème d'excellence dans les ENR, avec notamment l'éolien flottant, souligne Carole Delga. Deux fermes-pilotes vont être construites fau large des côtes de l'Aude, et plus tard un parc commercial. Et je ne désespère pas d'en avoir un deuxième car je vois que du côté de la région voisine méditerranéenne, il y a quelques sujets d'acceptation... »

Une gigafactory sur quel foncier ?


  • Sur la question du foncier qui sera nécessaire au plein déploiement de la gigafactory, le préfet se veut rassurant : « De la réserve foncière, il y en a. A terme on peut envisager un besoin de 200 hectares ».

  • Le dossier est à l'étude. « Pas de scoop », annonce Florence Lambert ce 30 septembre.

  • « Nous demandons à ce que les projets d'intérêt nationaux et européens, c'est à dire des projets d'infrastructures de transport et d'infrastructures économiques comme Genvia, ne soient pas comptabilisés sur la réserve foncière régionale mais au titre de la solidarité nationale car ce sont des enjeux de souveraineté nationale », plaide Carole Delga, faisant allusion aux ambitions de zéro artificialisation nette (ZAN) de l'Etat.

  • « Le préfet de région Etienne Guyot a relayé la même demande auprès du gouvernement et nous avons bon espoir d'obtenir gain de cause. C'est important car cela sécurise les élus et les industriels », ajoute le préfet de l'Hérault Hugues Moutouh.

Cécile Chaigneau

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