Hydrogène : les prémices de la gigafactory Genvia opérationnelles à Béziers

La future gigafactory Genvia, bras armé du déploiement industriel d’une technologie de rupture de production d’hydrogène mise au point par le CEA Grenoble, prend forme sur le site de l’entreprise Cameron-Schlumberger, à Béziers. L’atelier-pilote est opérationnel. Une trentaine de salariés y travaillent pour valider le transfert de technologie, avant une première ligne de production en 2022. Visite.
Cécile Chaigneau
Sur le site de Cameron à Béziers, l'un des quinze bâtiments de briques a été transformé et adapté, et une trentaine de salariés de Cameron ont été mis à disposition de Genvia pour faire tourner l'atelier-pilote.
Sur le site de Cameron à Béziers, l'un des quinze bâtiments de briques a été transformé et adapté, et une trentaine de salariés de Cameron ont été mis à disposition de Genvia pour faire tourner l'atelier-pilote. (Crédits : Ardito)

Depuis plusieurs mois que l'annonce a été faite, tous les regards sont tournés vers Béziers, et plus précisément vers le site industriel historique de l'entreprise Cameron, spécialisé dans les équipements pour les filières gazière et pétrolière et rachetée par le groupe Schlumberger en 2015.

C'est là que s'installe progressivement la gigafactory Genvia, bras armé du déploiement industriel d'une technologie de rupture de production d'hydrogène décarboné par électrolyseurs haute température à oxyde solide, initialement développée par le CEA Grenoble. Si le centre de transfert technologique est basé au CEA-Grenoble, le siège de Genvia est à Béziers.

Genvia est une société conjointe, sur un modèle de partenariat public-privé, entre Cameron-Schlumberger, le CEA Grenoble, Vinci Construction, Vicat et l'Agence Régionale Énergie Climat (AREC) Occitanie. C'est Florence Lambert, forte d'une expérience d'une vingtaine d'années au CEA-Liten (l'un des principaux instituts dédiés à la transition énergétique en Europe), qui a été nommée P-dg de la co-entreprise à compter du 1er mars dernier.

Le site de Cameron-Schlumberger à Béziers fabrique des ram-block, sortes de grosses mâchoires métalliques qui équipent les Blow Out Preventer (en français, blocs obturateurs de puits) destinés aux plateformes pétrolières. C'est parce que les technologies de l'hydrogène requièrent en partie les mêmes compétences de base que dans les métiers de l'oil & gas (mécanique, chaudronnerie, métallurgie, etc.) que le site biterrois a été choisi.

Un atelier-pilote pour valider le transfert de technologie

Sur le site de Cameron, implanté non loin du canal du Midi à Béziers depuis plus de 100 ans sur quelque 10 ha, l'un des quinze bâtiments de briques (1.800 m2) a été rénové, transformé et adapté, et une trentaine de salariés de Cameron ont été mis à disposition de Genvia. Soit une valorisation globale (mise à disposition et rénovation du bâtiment, mise à disposition de salariés) de 5 millions d'euros d'investissement, soutenus par une aide de Bpifrance de 800.000 euros dans le cadre du plan de relance.

Genvia, sur le site de Cameron à Béziers

Un bâtiment de 1.800 m2 de Cameron a été dédié à Genvia.

Une partie des travaux a été réceptionnée en août, une autre partie l'est ce 21 octobre. Le démarrage de la gigafactory s'est traduit par la création d'un atelier-pilote. Dans une salle aux allures de laboratoire de recherche, réplique de celui du CEA Grenoble, les salariés formés par le CEA travaillent à valider le transfert de technologie.

« Notre installation sera terminée fin novembre et une trentaine d'électrolyseurs devraient sortir de l'atelier-pilote, en attendant la première ligne-pilote qui sera opérationnelle en septembre 2022, explique Pierre Cappelle, directeur des opérations chez Genvia, en traversant l'espace, déjà prêt, qui lui est réservé. La première ligne de production, elle, permettra de fabriquer 300 électrolyseurs par an. »

Le site montera alors progressivement en puissance, avec 1.000 électrolyseurs par an à horizon 2023, avant que la gigafactory n'atteigne sa pleine capacité de production en 2024, avec douze lignes de production. L'objectif annoncé de Genvia est d'atteindre 1 GW de production d'hydrogène par ses électrolyseurs en 2030.

Dans l'atelier-pilote de Genvia, à Béziers

Dans l'atelier-pilote de Genvia à Béziers, les salariés valident le transfert de technologie de production d'hydrogène par électrolyseurs à oxyde solide.

Équiper les gros industriels

« L'objectif de Genvia, c'est de faire baisser le coût de l'hydrogène et de le rendre compétitif par rapport aux autres sources d'énergies, soit un prix de moins de 2 euros le kg, contre 12 à 15 euros aujourd'hui », précise Pierre Cappelle.

Selon le CEA, « la technologie Genvia, qui vise à atteindre le plus haut niveau d'efficacité, permet de réduire considérablement la consommation d'électricité par kilogramme d'hydrogène produit. Cette technologie d'électrolyseur est la première à être complètement réversible, permettant de basculer d'un mode électrolyse à un mode pile à combustible ».

« Il s'agit, pour séparer l'oxygène et l'hydrogène, de casser la molécule à l'état de vapeur d'eau à haute température (700 à 800°, NDLR), ce qui offre un rendement meilleur », expliquait Florence Lambert à La Tribune le 16 février dernier.

Les systèmes modulaires (comprenant l'électrolyseur mais aussi tous les équipements annexes) qui sortiront de la gigafactory biterroise ont vocation à équiper prioritairement les gros industriels, à commencer par Schlumberger notamment mais aussi Vicat et pourquoi pas la future usine de production d'électricité de Port-la-Nouvelle, portée par la société de projet Hyd'Occ (Qair Premier Element et AREC).

« Les premières applications seront la fourniture d'hydrogène industrielle, mais aussi l'accompagnement des énergies renouvelables, et, le plus difficile, les mobilités lourdes », soulignait Florence Lambert en février.

25 ha d'emprise foncière

Pas de classement Seveso en vue pour cette gigafactory, dont l'emprise foncière devrait avoisiner les quelque 25 ha à terme, incluant la sous-traitance dans un modèle d'intégration le plus complet possible.

Outre le site de Cameron, où des arbitrages sont attendus à horizon 2024 par Schlumberger sur de possibles autres transferts de bâtiments vers Genvia, « du foncier est recherché et on discute déjà avec la Région Occitanie, l'agglomération de Béziers et les agglomérations alentours », indique Pierre Cappelle.

A horizon 2030, Genvia annonce qu'elle génèrera 500 emplois directs et 1.500 indirects.

Cécile Chaigneau

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