HUman at home projecT : l’appartement-observatoire de l'IoT se concrétise

Parce que les nouvelles technologies et les objets connectés vont modifier nos comportements, il est important de s’interroger sur cet impact. Le HUman at home projecT (HUT) engage des équipes scientifiques pluridisciplinaires dans l’observation d’un binôme vivant dans un appartement ultra-connecté. Une expérience inédite, qui se concrétise à Montpellier et devrait démarrer en septembre 2018.
Cécile Chaigneau
(Crédits : DR)

Nul doute que l'expérience de l'appartement-observatoire qui démarre à Montpellier nourrira un feuilleton riche de son originalité (il n'existe à ce jour rien d'identique au monde) et des avancées scientifiques qui en découleront. Non pas sur la question des technologies qui y seront expérimentées mais plutôt du côté des sciences humaines et sociales, largement sollicitées dans ce projet.

Car, comme le martèle Alain Foucaran, directeur de l'Institut d'électronique et des systèmes (IES) à Montpellier, et initiateur du projet avec l'unité de recherche montpelliéraine Dynamiques du droit, « le XXe siècle a été celui des sauts technologiques, le XXIe sera celui du saut des usages... Il est grand temps de remettre les sciences humaines et sociales au sein de la problématique, elles doivent guider la recherche. C'est en ça que le projet est intéressant ».

Centrée sur l'humain

Les nouvelles technologies et les objets connectés dans notre quotidien posent d'ores et déjà d'importants problèmes d'éthique et d'acceptabilité. C'est à l'analyse scientifique de leurs usages et de leurs effets sur le comportement humain que se consacrera le projet désormais baptisé HUT, pour « HUman at home projecT », officiellement porté par Malo Depincé, maître de conférences et directeur adjoint du laboratoire Dynamiques du Droit de Montpellier.

 « Nous voulons observer comment les gens vont s'approprier ces technologies, les utiliser ou les refuser », explique Malo Depincé.

Une approche centrée sur l'humain donc, qui permet de faire travailler ensemble des équipes scientifiques pluridisciplinaires, allant des sciences dures aux sciences humaines.

Un consortium formé

Le coût du projet a été évalué à 8,5 M€ sur trois ans, comprenant le travail des chercheurs, mais aussi la location de l'appartement, les coûts de son équipement (quoique relativement minimes) et l'animation scientifique.

Le CNRS termine de financer la phase d'étude, avec deux enveloppes de 14 000 € chacune. Montpellier Méditerranée Métropole donnera la 3e enveloppe, d'un montant de 700 000 €, d'ici la fin de l'année.

« Nous n'avons pas encore le financement de la Région Occitanie mais elle a confirmé son intention de financer HUT, ajoute Matthieu Compin, ingénieur en conception instrumentale au CNRS, rattaché à l'IES, et chef de projet en charge de la coordination technique et de l'animation du projet HUT. En juillet 2017, nous avons déposé une lettre d'intention pour l'appel à projet de la Région, "Plate-forme régionale des recherches et innovation". Nous devons retravailler le dossier pour faire ressortir le côté plate-forme du projet HUT. Cet appel à projet devrait apporter 2 à 3 M€ sur trois ans, par le biais de financements européens. »

La première mouture du consortium de partenaires comprend donc le CNRS, l'Université de Montpellier, l'Université Paul Valéry, la Métropole de Montpellier, la COMUE-LR et l'entreprise montpelliéraine Oceasoft (fabricant de capteurs).

« Nous irons chercher d'autres financements auprès d'entreprises en proposant des projets d'innovation expérimentés sur la plate-forme HUT », précise Matthieu Compin.

Des entreprises comme Aviitam, Choosit, Omicron-Hardtech ou Synox suivent le projet depuis le début, Nexity et EDF depuis quelques mois. Elles rejoindront HUT par le biais d'un contrat de partenariat. La French Tech Montpellier et le cluster FrenchSouth.digital ont aussi confirmé leur intérêt.

Le casting va démarrer

C'est d'ailleurs un appartement de 70 m2 loué à Nexity qui vient d'être choisi pour concrétiser le projet HUT, à Montpellier. Soit un espace de vie de 50 m2 et une pièce réservée pour accueillir le serveur informatique et du matériel.

Par ailleurs, la Maison des sciences et de l'homme (MSH) à Montpellier accueillera un « open-space », où seront notamment réalisés des tests sur les capteurs, avant d'être transférés dans l'appartement. La MSH sera aussi un lieu d'échange et de rencontre pour les équipes pluridisciplinaires.

Truffés d'objets connectés et de capteurs, l'appartement HUT sera occupé par  un binôme de « cohuteurs ». Le projet prévoit d'observer, sur une période d'un an à chaque fois, six binômes recrutés parmi les étudiants montpelliérains.

« Le casting va démarrer, précise Alain Foucaran. Il sera dirigé par Anne-Sophie Cases, maître de conférences à Montpellier Research in Management (MRM, Université de Montpellier, NDLR). Nous ne voulons pas d'acteurs... C'est pourquoi nous pensons nous rapprocher des équipes travaillant avec des spationautes pour recruter des gens en capacité d'oublier la présence des capteurs. C'est là que les sociologues sont importants. »

Comité d'éthique

Dans le même temps, démarre l'équipement de l'appartement. Il devrait être prêt en février 2018, et pourrait permettre une phase de test « pendant six mois, notamment avec la CNIL, avec des étudiants volontaires et cobayes capables d'accepter que ça ne marche pas au début », déclare Matthieu Compin.

Le démarrage réel de l'expérimentation pourrait intervenir en septembre 2018, adossé au rythme d'une année universitaire.

Autre étape en cours : le recrutement d'un chef de projet au profil marketing pour le pilotage administratif. Du côté de l'unité Dynamiques du droit, on travaille à la création d'un comité d'éthique avec l'Académie des sciences et lettres de Montpellier.

Coup de théâtre

Enfin, projet dans le projet, une pièce de théâtre, « Cohuteurs chahutés », est en cours de préparation suivant un processus inédit. L'idée est là aussi née dans l'esprit d'Alain Foucaran.

« Au tout début, quand nous présentions le projet pour fédérer des laboratoires, j'avais remarqué qu'il y avait environ 30 % de personnes qui n'adhéraient pas, explique-t-il. Je me suis alors demandé comment capter les réticences... J'ai eu l'idée de monter une pièce de théâtre qui mettrait en scène deux co-locataires, un pro-technologies et un utilisateur modéré, qui seraient tous les deux chahutés dans leurs convictions. »

La DRAC est sur le coup, de même que la direction de la culture de la Région Occitanie, la Métropole de Montpellier et le théâtre de la Vignette à Montpellier.

« Nous allons lancer un appel d'offres pour qu'une compagnie s'empare du sujet. L'idée, c'est ensuite de réunir les partenaires et de faire travailler devant eux deux acteurs en mode improvisation, dans 12 situations déjà définies. Les échanges qui en naîtront viendront nourrir le dialogue des acteurs, jusqu'à ce que le dialoguiste ait suffisamment de matière pour écrire la pièce. Elle pourrait être prête fin 2018, le projet étant qu'elle tourne en France. »

Cécile Chaigneau

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