La medtech AI-Stroke veut détecter les AVC grâce à l’intelligence artificielle

AI-Stroke s’attaque à un fléau mondial, l’accident vasculaire cérébral (AVC). Elle vient de convaincre le jury du 25e concours d’innovation i-Lab 2023 du bien-fondé de son application mobile, un "Neurologue numérique" fonctionnant avec de l’intelligence artificielle pour détecter un AVC avec un simple smartphone ou une tablette. Explications.
Cécile Chaigneau
La medtech AI-Stroke a développé un neurologue numérique qui, par des questions simples et l'analyse des réactions du patient via l'IA, permet de calculera la probabilité d'AVC et le type d'AVC.
La medtech AI-Stroke a développé un "neurologue numérique" qui, par des questions simples et l'analyse des réactions du patient via l'IA, permet de calculera la probabilité d'AVC et le type d'AVC. (Crédits : DR)

L'AVC est une interruption soudaine d'apport de sang et d'oxygène vers le cerveau suite à l'obstruction d'une artère ou à une hémorragie. Il s'agit de la deuxième cause de décès dans le monde et on estime le nombre d'AVC en France à un toutes les quatre minutes, avec des conséquences potentiellement très graves, pouvant aller jusqu'au décès, si la prise en charge n'est pas immédiate. Un patient qui est frappé par un AVC perd 2 millions de neurones chaque minute...

Des chiffres qui font peur et que la startup montpelliéraine, créée en 2022, rappelle en guise de contexte, avant de présenter son application mobile dotée d'une intelligence artificielle et qui fait office de "neurologue numérique" pour réaliser, avec un smartphone ou une tablette, un test qui permettra, en temps réel, de détecter un AVC. Pour ça, AI-Stroke se base sur le test NIHSS (National Institute of Health Stroke Scale) qui est le test international de référence utilisé par les neurologues pour confirmer l'AVC et coter sa gravité.

« Sachant qu'un AVC peut être difficile à détecter, AI-Stroke peut détecter et confirmer un AVC en quelques secondes, indique Cédric Javault, fondateur et CEO. L'AVC se voit et s'entend : les signes d'un AVC apparaissent soudainement et sont une paralysie faciale, l'impossibilité de lever un bras ou une jambe et des difficultés d'élocution. Le "neurologue numérique" pose des questions simples issues du test NIHSS et capte le regard du patient, il filme ses réactions et les analyse pour détecter des traits caractéristiques de l'AVC. Puis l'IA calculera la probabilité d'AVC et le type d'AVC. »

Un essai clinique pour collecter des vidéos de patients

Ingénieur de formation et après une première vie professionnelle dans la sûreté nucléaire notamment, Cédric Javault a repris des études en intelligence artificielle en 2019. Et comme souvent, c'est « un sujet familial sur l'AVC » qui l'a lancé sur ce projet. Deux associés l'ont rejoint dans l'aventure : le Professeur Eric Thouvenot, neurologue au CHU de Nîmes, et Fabien Orsat, directeur informatique.

« Aujourd'hui, trois stagiaires ont rejoint AI-Stroke pour travailler sur les données publiques sur l'AVC et cet été, nous démarrerons l'essai clinique, car pour détecter un AVC, il faut entraîner l'IA, explique le dirigeant. Nous allons donc collecter des vidéos de patients en phase aigüe d'AVC au cours de cet essai clinique, approuvé par le comité d'éthique et la CNIL (Commission Nationale Informatique et Liberté, NDLR). Il sera réalisé au CHU de Nîmes, dans le service de neurologie du Professeur Thouvenot. Courant 2024, nous entraînerons l'IA et fin 2024, nous souhaitons démontrer que ça apporte un plus sur le terrain et il faudra alors un deuxième essai clinique. La commercialisation pourrait intervenir fin 2025. »

Premiers utilisateurs : les pompiers

Les premiers utilisateurs du "neurologue numérique" seront les sapeurs-pompiers : « Ils sont majoritairement des pompiers volontaires, donc pas forcément bien formés pour identifier un AVC, d'autant que le problème de l'AVC, c'est que les symptômes sont différents selon la zone du cerveau qui est touchée. Le SAMU américain a fait une étude : par téléphone, dans un cas sur deux, ils ne détectent pas l'AVC, et aux urgences, 22% des AVC ne sont pas détectés. Or il faut un maximum de 4h30 entre l'AVC et les traitements médicaux d'urgence... En France, 40% des patients sont hors délais et arrivent trop tard à l'hôpital où il n'est plus possible de leur administrer les traitements d'urgence ».

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« Aujourd'hui, les pompiers sont équipés de tablettes en lien avec le SAMU, ajoute Cédric Javault. Nous voulons utiliser ces tablettes existantes pour implémenter notre solution, et nous travaillons déjà avec un éditeur de logiciel qui équipe les pompiers. »

Le modèle économique n'est pas encore totalement arrêté et le dirigeant dit travailler sur plusieurs options possibles, envisageant notamment une prise en charge par la sécurité sociale en France. AI-Stroke ciblera trois marchés : la France, mais aussi l'Allemagne, premier marché européen, et les Etats-Unis, premier marché au monde de la santé.

Des moyens et de la visibilité

Le 4 juillet au soir, le ministère de la Recherche et Bpifrance ont dévoilé les résultats du 25e concours d'innovation i-Lab 2023 (financé par le Programme France 2030). Et AI-Stroke fait partie des lauréats. Incubée au BIC de Montpellier, la startup est soutenue par la SATT AxLR et membre du pôle de compétitivité santé Eurobiomed. Elle mène ses travaux de recherche en collaboration avec le CHU de Nîmes et le Laboratoire d'informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier (LIRMM).

« C'est une très belle reconnaissance du travail de toute l'équipe depuis dix-huit mois, commente Cédric Javault.

Le concours i-Lab finance les meilleurs projets de recherche et de développement, grâce à une aide financière pouvant aller jusqu'à 600.000 euros et un accompagnement adapté.

« Nous sommes ravis car ce concours donne des moyens financiers, même si on ne sait pas encore précisément combien, ça pourrait être au moins 250.000 euros, mais il apporte aussi de la visibilité, se réjouit Cédric Javault. Nous avons déjà réuni un premier million, entre le concours i-Lab, la bourse French Tech Emergence, des business-angels, la Banque Populaire du Sud, la SATT AxLR et des obligations convertibles Bpifrance. Il faudra 3 millions donc nous pourrions faire une levée de fonds fin 2024. »

En attendant, le dirigeant songe déjà au coup d'après : « A horizon dix ans, j'aimerais développer un outil de détection d'AVC au domicile des personnes ».

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Cécile Chaigneau

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Commentaire 1
à écrit le 06/07/2023 à 8:09
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Victime d’un accident cardio-vasculaire, j’ai fait un léger AVC en 2010. Je dois la vie à internet que j’ai consulté lorsque, ayant entré les symptômes sur Google, j’ai compris ce qui m’arrivait et fait ce qu’il fallait pour relancer ma circulation ...

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