La start-up IAGE expérimente un traçage de l’épidémie par les eaux usées

Spécialisée dans la recherche génétique appliquée à l’environnement, la start-up IAGE expérimente un procédé pour détecter le Covid-19 dans les eaux usées des agglomérations autour de l’étang de Thau, dans l’Hérault. Cette détection pourrait permettre d’évaluer l’évolution de la circulation du virus dans les populations.
La startup IAGE expérimente le traçage du Covid-19 dans les eaux usées du bassin de Thau.
La startup IAGE expérimente le traçage du Covid-19 dans les eaux usées du bassin de Thau. (Crédits : IAGE)

La détection du coronavirus dans les eaux usées pourrait constituer une avancée fondamentale pour suivre l'évolution de l'épidémie dans la population. Un nouveau procédé, initié par la start-up IAGE, est en cours d'expérimentation dans le cadre de la plate_forme d'innovation territoriale du Bassin de Thau.

Hébergée depuis 2017 à Agropolis Montpellier et spécialiste de l'analyse biologique environnementale, IAGE est spécialisée dans le diagnostic de plusieurs matrices en PCR (test diagnostique par réaction en chaîne par polymérase) Digitale. Cette technologie très robuste, référente dans le milieu médical, est notamment utilisée dans le domaine de la cancérologie et des maladies infectieuses pour des applications environnementales (sanitaires, alimentaires...).

Quantification précise des fragments d'ADN

« La Droplet digital PCR présente des avantages majeurs et nous avons travaillé pour la transposer sur de nouvelles applications, résume Franz Durandet, président et fondateur de la start-up IAGE. Suite à la publication d'une étude hollandaise révélant que le génome du coronavirus pouvait être détecté dans des sites de prélèvement d'eaux usées, nous en sommes venus à utiliser cette technologie dPCR, plus sensible que les méthodes classiques employées jusqu'alors, puisqu'elle permet de quantifier avec certitude les fragments d'ARN ou d'ADN du virus. »

Pour pouvoir expérimenter ce procédé, IAGE s'est rapprochée du Lab'Thau, plate-forme d'innovation territoriale portée par le Syndicat mixte du bassin de Thau (SMBT).

« La plate-forme d'innovation territoriale, qui met en relation universitaires, chercheurs, start-ups et collectivités, est un véritable laboratoire d'idées en faveur de la transition écologique et de la résilience des territoires littoraux, explique Yves Michel, président du Syndicat mixte et maire de Marseillan (34). Lorsque l'épidémie du coronavirus s'est déclarée, nous avons pensé qu'il serait intéressant de conventionner avec IAGE, start-up en pointe sur le traçage de fragments d'ARN ou d'ADN du virus dans les eaux usées, avant leur traitement en station d'épuration. IAGE a ainsi pu affiner son process et nous avons défini ensemble différentes zones de prélèvements sur le territoire autour de l'étang de Thau. »

Gain de temps pour limiter la propagation

Lorsqu'il est excrété par le corps, le virus, partiellement dégradé, présente peu de risques infectieux. Mais alors que les premiers symptômes du Covid-19 peuvent survenir jusqu'à quinze jours après l'infection, les fragments du virus excrétés par le corps sont détectables en moyenne quatre jours après la contamination.

« Il faut bien comprendre que l'information de la quantité de charge n'a pas d'impact sanitaire, note Franz Durandet. En revanche, elle nous sert à connaître l'évolution de la circulation du virus dans le temps, notamment car l'enrichissement des eaux usées en coronavirus peut être dû à des porteurs peu ou pas symptomatiques. Ce suivi régulier, à partir d'un point zéro, va permettre d'anticiper tout rebond de l'épidémie et donc faire gagner du temps. »

Premières analyses cette semaine

Privilégiant les zones à plus forte densité comme Sète, Mèze ou Marseillan, la start-up IAGE a procédé à des premiers prélèvements pour trouver un marqueur de l'évolution du virus qui va donner lieu à des analyses.

« L'avantage de travailler avec le Bassin de Thau, c'est que ses eaux usées sont surveillées et analysées régulièrement, ce qui rend notre analyse encore plus efficiente, précise le fondateur d'IAGE. Nous attendons éminemment les résultats de nos premiers prélèvements mais ce ne seront que des indicatifs. Il faudra attendre à minima deux à trois semaines pour avoir une tendance quant à l'évolution de la quantité de la charge. Nous pourrons alors croiser les données avec l'afflux touristique. »

Outil d'aide à la décision

Si le système d'alerte n'a pas encore modélisé la prise en compte de l'analyse des eaux usées, le SMBT travaille avec l'Agence régionale de santé (ARS) Occitanie et les préfets pour s'assurer que les résultats soient bien corrélés.

« La saison approche, les déplacements et les brassages de population vont se multiplier... Nous voulons à tout prix éviter de nous retrouver dans un foyer de contagion fort, d'autant que les touristes restent un temps limité sur notre territoire avant de repartir chez eux, synthétise Yves Michel. L'analyse des fragments d'ADN du virus peut favoriser la réactivité et si besoin la nécessité de circonscrire des zones ou un secteur géographique précis ».

Une décision sanitaire qui relèverait alors de l'Etat et des autorités compétentes sur le territoire.

Face à la crainte d'une seconde vague de contamination, IAGE a bon espoir que cette veille, complémentaire des autres approches épidémiologiques, puisse être généralisée sur l'ensemble du territoire.

« Notre technologie, qui s'appuie sur de la quantification absolue, peut devenir un outil précieux d'alerte, assure Franz Durandet. Notre volonté est de la faire valider et d'intégrer un consortium national pour pouvoir mener des analyses à plus grande échelle. »

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