Le sénateur Henri Cabanel s'obstine sur le casier vierge des élus

Pas facile de faire bouger les lignes. La loi sur la moralisation de la vie publique ne coule pas de source. Le 11 juillet au Palais du Luxembourg, les sénateurs ont rejeté l’amendement du sénateur héraultais Henri Cabanel (PS) sur l’obligation pour un candidat à une élection de présenter un casier vierge. Explication de texte.
Cécile Chaigneau

Le sénateur de l'Hérault Henri Cabanel (PS) se dit « déçu et en colère ». Le 11 juillet, le Sénat a rejeté son amendement obligeant tout candidat à une élection à présenter un casier vierge.

« Le candidat Macron avait inscrit le casier vierge pour les candidats dans ses propositions de campagne, rappelle le sénateur. Résultat : plus de casier vierge dans le projet de loi "rétablissant la confiance dans l'action publique". »

Les sénateurs de la majorité sénatoriale (Les Républicains) et le groupe La République en Marche ont émis un avis défavorable aux motifs que « la mesure est anticonstitutionnelle », que « seul un juge doit pouvoir décider de l'inéligibilité d'un candidat », et qu'« il faut accroître les peines d'inéligibilité qui existent déjà ».

Accroître la défiance des citoyens

« Rejeter purement et simplement cette proposition ne fait qu'accroître la défiance des citoyens, regrette Henri Cabanel. Ils ne voient, dans ces querelles politiques, sous couvert d'expertise juridique, que l'envie des élus de ne surtout rien bousculer, et ils ironisent déjà sur le fait que si le casier vierge était voté, il n'y aurait plus de candidat à des élections... Comment expliquer que nous souhaitons vraiment faire bouger les lignes si nous baissons les bras à chaque vraie mutation ? Les bonnes intentions, c'est bien, mais les Français attendent des actes. Ces postures troublent le débat politique, troublent l'action de milliers d'élus qui travaillent pour l'intérêt général avec abnégation et qui sont pourtant amalgamés dans les affaires d'une poignée d'autres. La vieille politique est toujours là, bien là... »

Et le sénateur de rappeler qu'en France, plus de 300 professions exigent un casier vierge pour tout recrutement « alors qu'un candidat à des élections peut s'en exonérer ».

« Je formule le vœu que l'Assemblée Nationale puisse débattre sur ce sujet, préconise le sénateur héraultais. Je vais essayer de trouver un député pour soutenir cet amendement, en commençant par solliciter tous les députés de mon département. Le prendra qui voudra ! »

« Réducteur et démagogique »

Le débat au Palais du Luxembourg se poursuivait sur la question des emplois familiaux pour les collaborateurs parlementaires.

Tard dans la nuit du 11 au 12 juillet, les quelques sénateurs présents votaient en faveur d'un amendement supprimant l'interdiction de l'emploi familial pour les collaborateurs parlementaires, mesure-phare du projet de moralisation de la vie publique qui semblait faire consensus. Le tollé fut général...

Compte tenu du faible nombre de sénateurs présents au moment du vote, et aussi parce que l'interdiction des emplois familiaux avait été votée pour les ministres, le président de la Commission des lois exigeait un nouveau vote. Lequel rétablissait une majorité en faveur de l'interdiction des emplois familiaux.

Le sénateur Cabanel est concerné au premier chef par le sujet, lui qui emploie son épouse à mi-temps en tant qu'assistante « pour des missions de secrétariat ».

 « De fait, je n'ai pas voulu prendre part à ce vote, mais j'avais décidé de mettre fin à son contrat à la fin du mois d'août quelle que soit l'issue de la délibération sur ce texte, déclare l'élu qui ne cache pas son opinion sur le sujet. Interdire les emplois familiaux ne permettra en rien de résoudre le problème qui se pose au travers de ce texte. Faire l'amalgame entre emplois familiaux et emplois fictifs est réducteur et démagogique. L'interdiction de l'un n'entraînera pas automatiquement la fin de l'autre. »

Le sénateur a proposé plusieurs amendements réformant le métier de collaborateur parlementaire (demander une fiche de poste,  définir une mission pour les collaborateurs, imposer une évaluation chaque année). Tous rejetés.

« Un état d'esprit conservateur »

C'est dans cette même logique que Henri Cabanel s'était lancé, en 2016, dans une démarche originale pour un élu : faire évaluer, par l'AFNOR, son cabinet parlementaire sur des critères de RSE (responsabilité sociétale des entreprises). Il obtenait la certification ISO 26000 en novembre 2016, et déclare aujourd'hui « continuer de travailler sur des critères d'amélioration, dont un des axes principaux est le transport... je fais un effort particulier pour privilégier le train à l'avion par exemple ».

En ouvrant cette nouvelle voie, l'élu espérait faire des émules auprès d'autres sénateurs.

« Je n'ai pas fait d'émule jusqu'à présent, mais j'ai abordé cette question dans le cadre du texte de loi sur la moralisation de la vie publique, notamment avec les emplois familiaux qui, pour moi, cachent la forêt des emplois fictifs, ajoute-t-il. On me répond que ce n'est pas possible, mais j'ai voulu expliquer à mes collègues que si, c'est possible de le faire ! »

Incontestablement, l'élu est amer.

« Depuis le début de ce texte, et au travers de toutes les propositions pour davantage d'éthique, de transparence et d'équité, j'ai senti un état d'esprit assez conservateur dans l'hémicycle, ce qui me choque un peu, surtout par rapport aux ambitions de ce texte, conclut Henri Cabanel. Je vais regarder attentivement les débats qui nous permettront de juger si effectivement, le président Emmanuel Macron est en train de faire de la politique autrement, en rétablissant la confiance dans l'action publique. Sinon, je me permettrai de penser qu'il a voulu donner une image nouvelle mais qu'on refait la même politique. Au delà du texte de loi, j'espère surtout que ce débat débouchera sur des actes. »

Cécile Chaigneau

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Commentaire 1
à écrit le 15/07/2017 à 9:44
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Comme ceux sont tous des truands ils s'auto protègent. Pour un citoyen lambda postulé un poste dans une mairie au bas de l'échelle on lui exige un casier vierge.où est la justice.

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