« Le marché de l’empreinte carbone est mature » (Helen Etchanchu)

INTERVIEW - Alors que le dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), publié le 4 avril, évalue justement comment réduire les émissions de gaz à effet de serre, la startup montpelliéraine Sweep boucle une 3e levée de fonds, de 73 millions de dollars. Phénomène ? Signe d’une réelle prise de conscience ? Bon timing ? La Tribune a interrogé la chercheuse Helen Etchanchu, professeur associé et titulaire de la chaire Communication and organizing for sustainability transformation à Montpellier Business School, également cofondatrice de OS4future, collectif de chercheurs engagé dans l'action pour le climat.
Cécile Chaigneau
Helen Etchanchu est professeur associé et titulaire de la chaire Communication and organizing for sustainability transformation à Montpellier Business School, et cofondatrice de OS4future, un mouvement académique engagé dans l'action pour le climat.
Helen Etchanchu est professeur associé et titulaire de la chaire Communication and organizing for sustainability transformation à Montpellier Business School, et cofondatrice de OS4future, un mouvement académique engagé dans l'action pour le climat. (Crédits : DR)

Helen Etchanchu est professeur associé et titulaire de la chaire Communication and organizing for sustainability transformation, coordinatrice du groupe de recherche et de pédagogie du Sustainability lab, et référente pour les Principles of Responsible Management Education à Montpellier Business School. Elle est aussi cofondatrice de OS4future, un collectif de chercheurs engagé dans l'action pour le climat.

LA TRIBUNE - La startup montpelliéraine Sweep, qui a développé une plateforme de gestion de l'empreinte carbone pour les grandes entreprises, boucle une 3e levée de fonds, de 73 millions de dollars. Est-ce surprenant ?

Helen ETCHANCHU - Non, je ne suis pas surprise car le marché est mature, la demande est là. C'est le futur. Il y a une réelle opportunité business car il y a de réels enjeux climatiques. Les équipes de Sweep ont une réelle légitimité sur l'expertise carbone, d'autant qu'ils ont réussi à embarquer un ancien de Carbone 4 (Renaud Bettin, cofondateur de Net Zero Initiative chez Carbone 4 et expert de la compensation carbone, NDLR), qui est le principal acteur de la décarbonation en France. Ce concept de plateforme numérique de suivi du bilan carbone pour les entreprises est innovant et très prometteur car peut-être plus démocratique et avec un impact à plus grande échelle. On sort de l'accompagnement personnalisé des cabinets conseil, et on peut toucher plus de monde plus vite. Or c'est vraiment le sujet aujourd'hui : être ambitieux et aller vite...

Qu'observez-vous de la prise de conscience de l'urgence climatique et des ambitions carbone dans les entreprises ?

La prise de conscience dans les entreprises est plus ou moins avancée aujourd'hui et on voit encore beaucoup d'effets d'annonce, de bonne volonté, mais les entreprises ne sont pas staffées et manquent de ressources. Souvent, on rajoute une casquette "écologie" à un métier alors que les personnes n'ont pas les compétences requises sur le climat, l'empreinte carbone et la biodiversité. En raison de ce manque de compétences, les entreprises ont recours à des services externes... Je constate aussi un manque d'ambition qui vient plus de l'incompréhension des enjeux auxquels on fait face et de l'objectif principal qui reste la création de richesses. La première question que doit se poser l'entreprise, c'est le périmètre du bilan carbone. Et la première chose à faire, c'est de réduire les émissions carbone à la source, or les entreprises recourent trop vite à la compensation et parfois sur de mauvais projets. Il y a encore un vrai gouffre entre prise de conscience et action, d'où le besoin d'accompagnement et d'outils.

Pour piloter une stratégie carbone, les entreprises ont besoin d'outils mais aussi, vous l'avez souligné, de compétences internes. Forme-t-on aujourd'hui suffisamment dans les écoles pour fournir ces compétences sur le marché du travail ?

Il y a en effet de gros enjeux de formation. The Shift Project (think tank présidé par Jean-Marc Jancovici, qui œuvre en faveur de l'atténuation du changement climatique et d'une économie libérée de la contrainte carbone via la réduction de la dépendance aux énergies fossiles, NDLR) a lancé un projet avec de grandes écoles d'ingénieurs il y a deux ans pour intégrer ces enjeux dans les enseignements. Montpellier Business School est partenaire sur la suite : le projet "Climat Sup Business" pour intégrer ces enseignements dans les cursus des écoles de commerce.

Cécile Chaigneau

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