Arterris et Vivien Paille veulent accélérer le développement de la filière riz de Camargue IGP

Le producteur et collecteur de riz Arterris lance, avec son partenaire commercial historique Vincent Paille, des contrats pluriannuels visant à inciter les producteurs à s’engager dans une filière intégrée et durable. L’objectif est double : préserver la biodiversité des terres et tendre vers plus de souveraineté nationale.
La coopérative agricole Arterris veut renforcer son offre riz IGP Camargue et inciter davantage de producteurs à la rejoindre.
La coopérative agricole Arterris veut renforcer son offre riz IGP Camargue et inciter davantage de producteurs à la rejoindre. (Crédits : DR)

Réunissant une cinquantaine d'adhérents sur les 160 que compte la filière rizicole de Camargue, la coopérative agricole Arterris, dont le siège régional est basé à Fourques (Gard), veut renforcer son offre riz IGP et inciter davantage de producteurs à la rejoindre. Elle vient de lancer, avec son partenaire commercial Vivien Paille, spécialiste de la transformation et du conditionnement de riz, céréales et légumes secs, des contrats pluriannuels inédits.

« Il y a des opportunités de marché pour renforcer la production française mais nous avons besoin d'aligner les capacités et les méthodes de production à ces besoins, indique Jacques Groison, directeur général adjoint d'Arterris. Ceci ne peut se faire que dans le cadre d'une relation durable et de confiance entre les différents maillons de la chaîne. »

Selon un rapport de France AgriMer 2021-2022, les superficies de culture de riz en France étaient estimées à 12.402 ha, pour une production de 63.799 tonnes de riz brut. Quant aux importations de riz de la France, elles ont progressé de 13% sur l'ensemble de la campagne par rapport à 2020/2021, à 561.710 tonnes. Sur le marché mondial, les prix du riz avaient atteint, en août 2023, leur plus haut niveau en quinze ans, avec une hausse de 9,8% sur un mois, selon les chiffres publiés par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) début septembre.

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Arelate, une variété à forte valeur ajoutée

Sur ses silos d'Arles (Bouches-du-Rhône) et de Saint-Gilles (Gard), Arterris, qui a structuré une filière autour d'un offre qualitative IGP de Camargue (dont le rendement est inférieur de 25% par rapport à un prix classique), collecte chaque année entre 15.000 et 20.000 tonnes de riz long ou rond. Les prix fluctuent entre 300 et 700 euros la tonne.

Face à un environnement concurrentiel fort, et la production française étant largement insuffisante pour couvrir les besoins des consommateurs, la coopérative dégaine une offre visant à accompagner encore plus loin les producteurs en les faisant évoluer vers ce que le marché valorise.

« Le contrat pluriannuel engage les producteurs sur certains types de riz bien spécifiques comme la variété Arelate, très qualitative, sur laquelle il y a de nombreux débouchés, notamment dans la restauration collective ou les CROUS, indique Jacques Groison. Le contrat est non seulement une garantie pour le riziculteur de pouvoir se projeter plus sereinement et d'investir dans des équipements pour ses cultures mais aussi de pouvoir se déconnecter des marchés mondiaux. »

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Visibilité

Exploitant agricole à Fourques, Edouard Cavalier produit, sur une cinquantaine d'hectares, 300 tonnes de riz long (Arelate et riz parfumé) et 150 tonnes de rond, qu'il livre en totalité à la coopérative. Grâce à une météo clémente (contrairement à l'an dernier), sa récolte 2023 est satisfaisante, tant en qualité qu'en rendement. Pour la variété Arelate, le riziculteur vient de signer une offre de contrat trisannuel avec Arterris, à 600 euros la tonne : « Ce nouveau contrat de trois ans me permet d'avoir une visibilité pour anticiper mes assolements. En ce moment, je nivelle une parcelle de 8 ha sur laquelle je n'avais pas prévu de faire du riz. C'est un investissement important, de l'ordre de 3.000 à 5.000 euros par hectare. L'Arelate va représenter 35 ha de mes cultures rizicoles et le prix est fixé en avril pour le mois d'octobre. C'est très important d'avoir cette visibilité, surtout au vu du contexte géopolitique. Par contre, je ne m'engage dans ce contrat que sur 60% de mon rendement de manière à m'assurer de livrer la production, même en cas d'aléa climatique ».

Dans ces contrats pluriannuels, c'est le riziculteur qui opte, avec la coopérative, pour le mécanisme de prix qui lui convient le mieux, soit une indexation sur le prix du marché, soit un prix minimal ou fixe.

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Connecter les maillons de la chaîne

Le succès du contrat va aussi dépendre des négociations avec les industriels. C'est là qu'intervient Vivien Paille, marque française (300 collaborateurs, 200 millions d'euros de chiffre d'affaires) dans le giron du groupe Avril depuis juin 2022 et engagée de longue date auprès d'Arterris. C'est d'ailleurs elle qui transforme la totalité du paillis de la coopérative.

« Face à la concurrence internationale et aux enjeux environnementaux, il faut engager la filière rizicole camarguaise sur une ambition et une typologie de produits, résume Yannick Hus, directeur des achats de Vivien Paille. Cela doit passer par l'intégration sur le long terme de tous les maillons de la chaîne, de l'aval à l'amont. Notre rôle est de connecter les besoins, de donner de la perspective mais aussi de sensibiliser le marché industriel, notamment la GMS, à valoriser dans leurs rayons les circuits courts. »

Abaisser la salinité

Face aux sécheresses successives depuis trois ans, le territoire de Camargue connaît de plus en plus de remontées de sel, obligeant de sacrifier d'autres cultures afin de laver les terres.

« La culture du riz a été introduite précisément pour dessaler les terres de Camargue, rappelle Philippe Dupuy, un autre riziculteur gardois. Le cahier des charges pour le riz impose des traitements beaucoup moins puissants aujourd'hui qu'il y a quelques années. Si on ne produit que d'autres cultures, les terres vont être beaucoup trop sales ou salées. »

De son côté, Yannick Hus déplore que « dans les années 1950 la Camargue comptait 32.000 hectares de rizières, et il n'en reste plus que 11.500... Ce serait formidable et vertueux pour l'écosystème camarguais d'inverser la tendance en atteignant 18.000 hectares ».

Justement, pour la première fois depuis longtemps, la courbe s'inverse : les surfaces dédiées à la riziculture sont en augmentation. Avec son offre de contrat, la coopérative Arterris espère aussi capter de nouveaux exploitants et mobiliser un maximum d'agriculteurs.

« Nous sommes en phase de démarrage mais cela commence à prendre, se félicite Jacques Groison. J'aimerais, à terme, arriver à convaincre 80 producteurs. Le riz de Camargue ne supplémentera jamais le riz d'import mais ce n'est pas forcément nécessaire. L'objectif est de trouver des marchés à la demande pour cette IGP Camargue qui valorise la production française et garantit une augmentation de la production dans les années qui viennent. »

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