Santé, un avenir ultra-connecté

Le Sommet économique de la santé, organisé par Objectif Languedoc-Roussillon avait lieu le mardi 3 mai 2016, au Corum à Montpellier. Il s’articulait autour de nombreuses prises de paroles sur la thématique « E-health, l’avenir de la santé ». Environ 250 personnes ont assisté aux conférences et débats.
Le Sommet Santé a organisé, durant tout l'après-midi du 3 mai, débats et conférences au Corum de Montpellier.

La santé présente un enjeu majeur de la société de demain et le Languedoc-Roussillon est l'un des territoires économiques en pointe et leader dans le domaine. C'est pourquoi Objectif Languedoc-Roussillon a réitéré ce rendez-vous en 2016, avec la 2e édition du Sommet économique de la santé, sur la thématique « E-health, l'avenir de la santé ».

Organisé le 3 mai au Corum à Montpellier, l'événement a rassemblé quelque 250 personnes venues assister aux débats et conférences, animés par Gérald Kierzec, médecin urgentiste, chroniqueur sur Europe 1 ou France 5.

« Montpellier compte la plus ancienne faculté de médecine d'Europe, et c'est à Montpellier qu'a été créé un diplôme d'Etat TIC Santé et qui est aujourd'hui incontournable, reconnu mondialement, déclare Chantal Marion, vice-président de Montpellier Méditerranée Métropole, représentant Philippe Saurel, en préambule aux travaux de l'après-midi. Par ailleurs, le quartier Eureka (futur quartier « connecté » à Castelnau-le-Lez, NDLR) sera un modèle, en terme bâtiment, pour l'accompagnement des personnes âgées. »

« Depuis la Loi "Hôpital patient santé et territoires", le rôle des collectivités territoriales est devenu important, souligne de son côté Marie-Thérèse Mercier, conseillère régionale, représentant la Région Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées. Il était donc logique de s'interroger sur le rôle de la Région dans cette programmation. Carole Delga a bien l'intention de renforcer ce rôle dans la promotion de la filière santé, en consolidant l'écosystème de la filière et en assurant un accès aux soins à tous les habitants. »

Elle rappelle quelques investissements notables réalisés par la Région Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées : le financement à 100 % de la nouvelle Faculté de médecine de Montpellier (plus de 45 M€), le mise en œuvre du plan « très haut débit » ou l'objectif de 100 maisons de santé sur le territoire (64 actuellement).

« Notre région est connue pour son investissement en matière de recherche, à hauteur de 3 % du PIB quand ailleurs, il est plutôt autour de 2 %. »

« La Caisse d'Epargne est le 1e financeur privé des hôpitaux publics, dont le CHU de Montpellier, a une présence significative dans les cliniques privées et les professions libérales, et elle a une part de marché plus méconnue, le médico-social associatif et mutualiste où nous sommes un des acteurs qui comptent, énumère Jean-François Manlhiot, président membre du Directoire de la Caisse d'Epargne Languedoc-Roussillon. La santé connectée est typiquement l'un des vecteurs de décloisonnement entre le privé, le public, le médico-social et la médecine libérale... Seventure, filiale de Natixis (Groupe BPCE) a également investi 160 M€ dans le fonds Health for Life, fléché sur le microbio et la santé connectée. »

Jacques Bringer, doyen de la Faculté de médecine de Montpellier évoquait « Montpellier, terre historique et d'avenir de la médecine en France et à l'international ».

« La formation doit former des médecins de proximité, apprendre la coordination des soins et former aux nouvelles technologies, déclare-t-il. Il est souvent dit que les nouvelles technologies rendront la médecine inhumaine. Pas du tout. Utiliser le numérique dans la santé demande énormément de formation et de doigté, pour combiner humanité et technologies. »

« Il manque le partage des données »

La première table ronde évoquait « La santé, bien commun de la société numérique ».

Pierre Brun, directeur stratégie, Harmonie Mutuelle :

« Demain, tout objet sera potentiellement connecté. Cela préfigure de changements importants qui appellent à un débat de fond sur l'usage et le devenir des données personnelles du patient. Nous travaillons avec Orange aujourd'hui sur un projet de création de plate-forme d'e-santé afin de répondre à ces problématiques. Notre objectif est de sécuriser les informations privées du patient et de les déconnecter des bases de données de la mutuelle. Il faut créer une étanchéité entre ces deux domaines. Dans notre cas, cette démarche est facilitée par notre identité mutualiste car nous n'avons pas d'actionnaire et donc pas de pression financière. »

Max Ponseillé, président Oc Santé :

« Le sujet de la santé numérique a le vent en poupe. Mais derrière les envolées lyriques, on oublie qu'il manque la base, à savoir le dossier médical, dit DMP. Lancé par l'Etat il y a quinze ans, ce programme est un échec. Une nouvelle tentative fut faite il y a deux ans mais sans résultat. Quand on parle de santé connectée, on peut proposer des systèmes intéressants et conviviaux mais il y a un point essentiel qui aujourd'hui n'est toujours pas au rendez-vous : la connexion et le partage de l'information entre les professionnels de la santé, au moins à l'échelle d'un territoire donné. »

Giovana Marsico, fondatrice Cancer contribution :

« Aujourd'hui, la voix des patients est très convoitée mais pas assez prise en compte dans le développement numérique de la santé. Notre plate-forme collaborative vise à exercer concrètement la démocratie sanitaire et à mettre le patient dans la boucle des décideurs en tant que partie prenante. Nous travaillons notamment sur un programme lié au virage ambulatoire et à la prise en charge à domicile. »

François Levin, rapporteur, Conseil national du numérique :

« Le rapport que le Conseil national du numérique a rendu à la ministre de la Santé en octobre 2015 fait le constat d'une trop grande verticalité des innovations numériques, notamment sur le sujet du DMP. Cette démarche nie le potentiel innovant des réseaux et des acteurs locaux. Nous préconisons donc moins de verticalité dans l'action publique. Il faut une modification de l'innovation à l'intérieur de l'Etat et libérer le potentiel privé. »

Le patient prendra le pouvoir

La thématique de la seconde table ronde était « E-health : la médecine de demain ». Chacun des participants évoquait une innovation en e-santé, ses avantages mais aussi les contraintes rencontrées dans son déploiement.

Vincent Attalin, médecin, CEO de Aviitam à Montpellier, inventeur d'un carnet de santé intelligent :

« Ce sont les patients qui remplissent leurs données de santé sur leur carnet, le médecin n'impose rien. L'objectif, c'est que le patient soit acteur de sa santé, avec la possibilité de partager ses données avec qui il veut. Les professionnels ont tellement de données qu'ils gagnent du temps en consultation... Seul un médecin peut vous inscrire sur Aviitam, et le carnet est extrêmement sécurisé. Un peu moins de 500 médecins aujourd'hui utilisent la plate-forme. Le ministère finance une étude auprès des praticiens pour comparer les pratiques avec ou sans carnet de santé. »

Frédérick Van Meer, CEO de Anatoscope à Montpellier :

« Nous sommes partis du pari qu'on aurait besoin de transformer des données en patient 3D. Et nous sommes persuadés que, plus que le médecin, c'est le patient qui voudra son avatar numérique 3D. Mais il n'y a pas de modèle économique derrière pour le moment. En attenant, nous avons trouvé une niche, dans le domaine dentaire. C'est de la CAO médicale : on modélise la mâchoire du patient, on essaie des traitements sur le patient virtuel et quand il est au point, on l'applique sur le patient réel. C'est un service payé par le médecin... Mais nous avons beaucoup d'applications dans nos tiroirs ! »

Marc Van Der Cruyssen, responsable du département e-santé chez Engie Ineo Digital :

« Engie a créé un fonds d'investissement de 143 M€ et une plate-forme web, OpenInnov, permettant de récolter des idées d'innovation à accompagner. Nous avons lancé un appel à projet sur la e-santé et identifié des start-ups. Par exemple, une start-up qui propose une solution de e-consentement : quand on annonce une pathologie, le patient doit consentir à un acte médical et cette solutions permet de l'informer, de diminue son stress car il comprend mieux, et de sécuriser le médecin. »

Daniel Laune, CEO de Kyomed, concepteur de dispositifs innovants en e-santé :

« L'idée est d'avoir une éthique dans la gestion des données, la confidentialité, l'utilisation des données. Demain, tout sera connecté mais personne ne parle de ce qu'on fera des données collectées... Nous aidons les entreprises à aller au-delà des frontières de la France, en adaptant les parcours de soins et les traitements aux différents pays, mais aussi les réglementations. Nous avons créé un réseau d'avocats partout en Europe. »

Sébastien Groyer, directeur d'investissement chez Seventure Partners, gestionnaire de fonds de capital risque :

« Seventure Partners a créé le fonds Health for Life Capital, afin de soutenir des projets dans les domaines de la nutrition microbio et de la médecine connectée et bien-être. Notre croyance, c'est que le patient sera celui qui prendra le pouvoir, via les objets connectés. Mais le patient n'est pas le payeur en santé, ce qui constitue le problème structurel de la médecine connectée, qu'on essaie de résoudre... Le fonds soutient ainsi une start-up hollandaise, Mint Solutions, proposant d'attester que le médicament pris est bien celui prescrit par l'hôpital, et une autre développant la possibilité pour n'importe qui de faire son propre électrocardiogramme au lieu d'appeler un urgentiste.

La data : l'eldorado

L'événement accueillait également deux intervenants : Éric Couhet, médecin, fondateur et dirigeant de la plate-forme numérique Connected Doctors, et Lionel Reichardt, expert en e-santé, fondateur de 7C's Health et blogueur Pharmageek, était le « grand témoin » du Sommet santé et évoquait la perception de l'e-santé, « promesse, fantasme ou réalité ».

« On est sur le 3.0, où la santé connectée devient un ménage à 3 : le médecin, le patient et les données médicales partagées, décrit le Eric Couhet. Le numérique donnera au patient une feuille de route lui permettant d'être plus prêt de son médecin. Il devient acteur de santé... La vague numérique arrivera par le patient, et non par les politiques ou les médecins. C'est lui qui déclenchera le modèle économique de la santé connectée... La santé connectée permet une rationalisation du parcours de soin, un gain de productivité, une réponse aux déserts médicaux et une réponse au maintien à domicile des personnes âgées. »

« Les systèmes de soin sont en train de se noyer et nous fondons beaucoup d'espérance dans l'e-santé, déclare Lionel Reichardt. On y voit le moyen de gérer de manière efficace à moins cher. En toile de fonds, il y a la data : c'est l'eldorado ! Mais le défi n'est pas de capturer la donnée mais de changer le comportement. En plus, on ne sait pas stocker toutes ces données... Il faut aujourd'hui se poser la question de ce qui motive les différents acteurs à vouloir collecter les datas. Car la e-santé devra être basée sur la transparence. »

Retrouvez le Sommet Santé en images.

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