Avec la crise sanitaire, Terra Hominis freine sur l’international au profit des terroirs français

La petite entreprise héraultaise Terra Hominis propose, via du financement participatif non réglementé, d’aider des vignerons à s’installer ou à développer leur vignoble. Bien implantée sur le Languedoc-Roussillon, elle privilégie désormais son déploiement sur d’autres terroirs en France plutôt qu’à l’international comme elle l’avait envisagé. Crise Covid oblige…
Cécile Chaigneau
(Crédits : DR)

Créée en 2011 à Boujan-sur-Livron (34), l'entreprise Terra Hominis n'est pas une entreprise de financement participatif au sens réglementé du terme. Et son président-fondateur, Ludovic Aventin, tient à ce modèle inédit : la prise de parts dans des vignobles en copropriété (via une SCI ou un groupement foncier agricole, adossé à un contrat de fermage pour le vigneron) afin d'aider des vignerons à s'installer ou à se développer, mais avec la perspective de rester dans l'aventure durablement, de créer du lien avec les vignerons et les autres actionnaires-investisseurs en participant à la vie du domaine, et de n'en tirer comme dividendes que des bouteilles de vin.

« Il s'agit de donner du sens à son investissement, nous cherchons, et même sélectionnons, des hommes, pas des actionnaires anonymes, et avec un certain état d'esprit, plaide inlassablement Ludovic Aventin, qui a notamment créé à ce jour un club de rugby et 18 clubs de dégustation (baptisés Épicure). Nous comptons aujourd'hui plus de 2 100 associés, pour 16 domaines viticoles aidés (la part est en moyenne entre 1 300 et 2 500 €, NDLR), 130 ha financés, 29 projets de vignobles en copropriété. L'objectif, c'est la transmission à nos enfants, que le domaine devienne celui de la famille. A chaque projet, on refuse des gens... »

Ludovic Aventin, fondateur président de Terra Hominis

Ludovic Aventin, fondateur président de Terra Hominis.

« Les vignerons français vont avoir besoin de nous »

Avec la crise sanitaire du Covid-19, l'entreprise a dû ralentir ses projets de développement à l'international. Ludovic Aventin, qui avait en effet prévu d'ouvrir des antennes à Barcelone et à Londres (pour conquérir notamment le marché des Français vivant en Angleterre), a préféré réviser ses ambitions.

« Nous avons mis ce projet de côté car la période n'est pas propice et les vignerons français ont et vont avoir besoin de nous, souligne-t-il. Il va probablement y avoir plus de vignerons à soutenir... Il faut savoir qu'aujourd'hui, les deux tiers des vignerons ont plus de 55 ans, et ne souhaitent pas céder leur vignoble à de grosses structures viticoles, on est en train de perdre ce qui fait la diversité des terroirs. Or ceux-là vont baisser les bras plus facilement en cas de problème... Avec le Covid, les vignerons ont perdu leurs circuits de distribution : on a demandé à la communauté de nos associés de se mobiliser en leur achetant du vin et ça a marché. »

Bordeaux, Cognac, Chinon...

En revanche, le déploiement de Terra Hominis sur d'autres territoires français que le Languedoc-Roussillon, où il est principalement implanté, est plus que jamais d'actualité.

« Nous sommes déjà présent un peu sur le vignoble bordelais, où nous allons bientôt boucler un 4e projet, et nous avons un projet en cours à Cognac, précise Ludovic Aventin. Nous venons de terminer un projet sur Chinon, dans la Loire. Le vigneron, Marc Plouzeau, a plus de 50 ans et il est en train de préparer sa transmission. Il préfère vendre à groupement d'associés via Terra Hominis. Quand il passera la main, un autre vigneron récupérera le fermage des terres mais n'aura pas besoin de les acheter, ce qui lui permettra d'être plus à l'aise sur sa trésorerie... Par ailleurs, il y a un projet autour du Muscadet qui nous intéresse car il concerne le cépage Melon de Bourgogne et de jeunes vignerons qui veulent s'installer. »

Sur sa région d'origine, parmi les derniers dossiers menés à leur terme par Terra Hominis, figure le Clos Rouge, un domaine situé dans l'appellation Terrasse du Larzac, en agriculture biologique. L'opération a permis au conjoint de la vigneronne de rejoindre l'exploitation, avec rachat de vignes et agrandissement du chai.

Deux autres projets sont en cours sur la région, un dans le Roussillon et un autre en vin nature, Ludovic Aventin n'en dira pas plus...

1e société à mission du monde agricole

L'autre grande actualité 2020 de Terra Hominis (7 salariés, 1,4 M€ de chiffre d'affaires en 2019, 2 M€ prévus en 2020), c'est sa transformation en société à mission depuis janvier dernier, devenant ainsi « la 1e structure dans le monde agricole à être passée à ce statut », souligne le fondateur.

« L'entreprise ne se limite plus à faire du profit, on s'est rajouté une raison d'être, celle de préserver la diversité de nos terroirs et des vignerons, explique-t-il. On a fait ça parce que c'était une évidence, c'est notre ADN. Je suis convaincu que c'est le statut juridique de demain, que l'entreprise doit aussi reconnaître sa responsabilité sociétale, sociale et environnementale... C'est une démarche qui, par ailleurs, nous permettra de mieux recruter car les personnes sont sensibles à cet engagement. C'est aussi un argument pour les vignerons qu'on propose d'accompagner, et ça inspire confiance pour les partenariats que souhaitons nouer. Ce n'est pas de la communication ou du greenwashing. »

Début octobre, le dirigeant se rendra à l'Assemblée nationale, sur invitation du député héraultais Philippe Huppé (LREM), pour présenter son activité et sa démarche. Il ajoute que le sénateur héraultais Henri Cabanel envisage lui aussi de l'inviter dans l'hémicycle du Palais du Luxembourg...

Cécile Chaigneau

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