Après Millésime Bio, le vin bio trinque-t-il à la santé du vin conventionnel ?

Le rendez-vous de la viticulture bio s’est tenu entre le 25 et 27 janvier, à Montpellier, pour la 23ème édition de Millésime Bio. Avec ce constat : les volumes de vins bio continuent leur progression mais pourraient marquer le pas faute d’un différentiel de prix suffisant avec les vins conventionnels.

Le vignoble bio a le vent en poupe. L'attractivité du salon international Millésime Bio l'atteste. Cet évènement à caractère professionnel a rassemblé cette année, entre le 25 et 27 janvier à Montpellier, quelque 873 vignerons (ils étaient 800 exposants en 2015) venus de quinze pays différents et plus de 4 500 visiteurs.

« Millésime Bio ferme ses portes, les objectifs sont atteints : le salon confirme sa place de leader du marché des vins bio, indique l'organisateur du salon, l'interprofession régionale SudVinBio. Cette année la stabilité est de mise avec plus de 4 500 visiteurs uniques (N.B. Ils étaient 4 800 en 2015).»

Dans les allées du salon, les vignerons affichent leur satisfaction car les affaires sont au beau fixe.

Une consommation qui progresse

« Le contexte est porteur, explique Virgile Joly du domaine éponyme dans l'Hérault. Le chiffre d'affaire de la filière (CA de 646 M€ en 2015) est en croissance de 13 %. La production viticole bio est largement absorbée par le marché des cavistes, de la vente directe et des magasins spécialisés. En grande distribution, les chiffres sont également au beau fixe, notamment pour les IGP Pays d'Oc bio.  Le rayon des vins dans la grande distribution est tiré par le bio, c'est le bio qui fait la croissance. »

Les chiffres sont là pour étayer le propos. Dans les rayons de la grande distribution, les ventes de bouteilles de vin bio ont augmenté de 7,5 % en un an (ils atteignent 16,1 M de cols en 2015 contre 14,9 en 2014). Les vins IGP Pays d'Oc sont en position de leadership avec 24 % de part de marché. Dans leur cas, la vente des bouteilles IGP Pays d'Oc progresse de 18,9 % en un an (3,8 M de cols vendus). Et la dynamique est similaire sur le marché du vrac.

« Le marché du bio va se renforcer, c'est une lame de fond », témoigne Gérard Bertrand. D'ailleurs, le producteur et négociant audois ne s'y est pas trompé. Il annonce la conversion en biodynamie de ses onze domaines (620 ha) et l'objectif d'accroître progressivement son approvisionnement en vin bio dans la région afin qu'en 2025, ces produits représentent 80 % de son chiffre d'affaires.

Quid de l'offre ?

« La consommation des vins bio progresse à un rythme soutenu (13 % en 2015) tandis que la production se stabilise avec une croissance de 3 % pour les trois prochaines années», indique  Patrick Guiraud, le président de SudVinBio.

La question qui reste en suspens : et la suite ?

« L'une des difficultés est la lisibilité sur les volumes de vin bio qui arriveront sur le marché dans les prochaines années », indique Gérard Bertrand.

Aujourd'hui, l'enjeu est de savoir dans quelle mesure la production suivra le rythme de la demande. « L'offre est un peu "limite" et nous sommes un peu inquiets pour les années suivantes », constate Jean-Fred Coste, le président du Caveau d'Héraclès, la coopérative de Vergèze (30), le premier producteur de vin bio en France (55 000 hl). Gérard Bertrand évoque quant à lui « une tension sur les vins blancs ». Tous les deux s'accordent à dire qu'il faut encourager les conversions en agriculture biologique... De son côté, Patrick Guiraud admet que « le challenge de la filière bio est de soutenir une progression importante de la production pour faire face à la consommation ».

Question d'opportunité

Les tensions qui se dessinent sur le marché bio ne sont pas étrangères à la bonne santé du secteur viticole dans son ensemble. Aujourd'hui, le vin conventionnel se vend également bien et la trésorerie des entreprises reprend des couleurs. Pour preuve, « le montant des crédits distribués dans le secteur viticole bat des records », indique Patrice Roch, responsable du pôle Agriculture et Coopératives du Crédit agricole Languedoc.

« Il y a quatre ans, les vins IGP Pays d'Oc en bio se vendaient entre 120 et 130 €/hl. C'est quasiment toujours le cas aujourd'hui alors qu' en conventionnel, sur la même période, on est passé de 50 €/hl à 80 €/hl », indique Patrick Guiraud. Bref, « le différentiel de prix entre les deux produits se rétrécit », résume Jean-Fred Coste qui est également membre du bureau de SudVinBio.

Comment accroître l'attractivité de la filière viticole bio ? Certainement pas en augmentant subitement le prix du vin, expliquent les représentant de l'interprofession.

« Nous sommes sur une logique de construction de prix et non de spéculation», indique Jean-Fred Coste. « Notre force est d'avoir défini à l'échelle d'une filière un prix qui permette aux vignerons de dégager un revenu, renchérit Patrick Guiraud. Nous sommes sur une économie durable fondé sur le principe d'un marché rémunérateur et non pas spéculatif ».

L'une des pistes envisagées est d' « investir sur le savoir-faire et l'ingénierie afin de donner les moyens aux vignerons de surmonter certaines contraintes techniques, explique Patrick Guiraud. En bio, c'est un facteur aussi important que le prix sur le sujet de l'attractivité ».

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