Les interprofessions viticoles du Languedoc-Roussillon dans la tourmente : querelles de chapelles ou crise de sens ?

S’il est bien un sujet épineux en cet été, c’est bien celui du devenir des interprofessions viticoles du Languedoc et du Roussillon. Sécessions, guerre d’influence entre familles professionnelles, etc. Difficile de deviner ce qui sortira de ces querelles dans les mois qui viennent. Au moment où la crise s’amplifie dans les vignobles, ces dissensions interrogent les missions des interprofessions viticoles régionales.
Les interprofessions viticoles du Languedoc et du Roussillon traversent une crise interne qui a déjà conduit plusieurs appellations à quitter le navire interprofessionnel...
Les interprofessions viticoles du Languedoc et du Roussillon traversent une crise interne qui a déjà conduit plusieurs appellations à quitter le navire interprofessionnel... (Crédits : Yann Kerveno)

C'était annoncé mais la nouvelle a quand même du poids. L'appellation Corbières a fait le choix de sortir de l'interprofession des vins du Languedoc (CIVL) avec ses 280.000 hectolitres et les trois euros de cotisation obligatoire par hectolitre. C'est la troisième appellation de la région à procéder ainsi après les appellations Minervois il y a quelques années et Fitou au printemps dernier. Si l'appellation audoise Malapère avait envisagé se joindre au mouvement, elle a fait machine arrière. Des sécessionnistes revendiqués ces derniers mois, il ne reste donc plus que Faugères qui devrait se prononcer à l'automne.

En Roussillon, c'est le cru Banyuls qui a acté le fait de sortir de l'interprofession, et l'indication géographiques des Côtes Catalanes qui menace de suivre le même chemin.

Au cœur de ces décisions, les récriminations sont les mêmes : les appellations concernées ont l'impression que les cotisations versées ne leur reviennent pas à leur juste valeur.

« Nous ne nous retrouvions pas dans les projets de l'interprofession, explique Olivier Verdale, président de l'AOP Corbières Cela fait vingt ans que les mêmes questions se posent et, en vingt ans, Corbières est passé de 700.000 à 280.000 hectolitres. Et jamais Christophe Bousquet (le président du CIVL, ndlr) ne m'a appelé pour en discuter. »

Dans le même temps, la pyramide imaginée, avec l'appellation Languedoc en socle et toutes les autres appellations au dessus, a été bouleversée : les vins sous appellation Languedoc sont régulièrement achetés plus cher que ceux des Corbières ou de Fitou. En Roussillon, l'ensemble de la communication s'appuie sur le nom de Roussillon, « ce qui ne laisse pas de place à Banyuls, Collioure ou aux Côtes catalanes », plaident les deux présidents des organismes de gestion des appellations, Romuald Peronne et Laurent Girbau.

« Nous allons nous rencontrer, avec les appellations Fitou et Minervois, pour voir ce qu'il est possible de faire ensemble, quelles mutualisations nous pouvons éventuellement mettre en place », indique Olivier Verdale, pour l'appellation Corbières, qui se veut rassembleur.

Lire aussiCrise au CIVL : mieux comprendre le différend entre production et négoce

« Un complot téléguidé »

Mais cette bataille, finalement assez médiatique, en cache une autre tout aussi virulente qui tient aux équilibres mêmes des interprofessions. Elle concerne la revendication des caves coopératives et des vignerons indépendants de disposer de plus de poids dans les instances en leur qualité de metteurs en marché direct, segment revendiqué et occupé jusqu'ici essentiellement, et historiquement par le négoce.

La bataille là aussi se déroule en parallèle dans les deux interprofessions.

« J'ai été auditionné par le conseil d'administration mais je crains que ce ne fût que pour la forme, on ne sent pas vraiment de volonté d'avancer sur ce dossier », regrettait, début juillet, Alexandre They, le président des Vignerons indépendants de l'Aude et porte-parole des metteurs en marché direct.

Après avoir fait achopper l'assemblée générale du conseil interprofessionnel des vins du Roussillon début juillet, le groupe des frondeurs a reçu une réponse cinglante de Stéphane Zanella, le président du CIVR au titre du négoce, qui a dénoncé « un complot téléguidé par les Vignerons indépendants avec l'aide de quelques idiots utiles dans la coopération qui estiment que leur nombre leur donne des droits ».

Au final, on ne voit donc guère comment les interprofessions vont sortir de ce mauvais pas, sinon à être dépouillées d'une partie de leurs forces vives au moment même où la crise s'amplifie dans les vignobles. À moins, comme le fait remarquer un observateur méticuleux du secteur, que les interprofessions changent de missions pour se concentrer, comme en Provence par exemple, sur les questions techniques et laissent les actions de communication aux appellations ?

Lire aussiViticulture : « C'est le changement climatique qui risque de réguler le marché » (Christophe Bousquet, CIVL)

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Commentaires 2
à écrit le 12/07/2023 à 13:13
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Ce qui compte, c'est ce qu'il y a dans la bouteille. Pour cela il faut aller voir les vignerons et goûter pour se faire une idée. Après , ce qu'il y a sur l'étiquette est accessoire. Le problème depuis quelques années c'est la standardisation des app...

le 13/07/2023 à 11:44
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Bonjour Rien ne vaut la visite d'une bonne cave bien fraîche. Et une dégustation, en Sarthe c'est la vallée du Loir, et tout se fait dans de vraies caves troglodytiques, un liquoreux de 2003 et on oublie toutes les piquettes victimes du changemen...

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