Ingénierie écologique : Biotope s’associe avec un Britannique et un Allemand pour créer une force de frappe européenne

L’entreprise héraultaise Biotope, spécialiste de l’ingénierie environnementale et écologique, prend des parts au capital du cabinet-conseil allemand BioConsult et de l’entreprise britannique HiDef Aerial Surveying. Une opération qui crée un ensemble européen d’envergure, à même de s’imposer sur de gros marchés d’ingénierie écologique. La nouvelle alliance compte notamment se distinguer sur l’évaluation des enjeux environnementaux et les retours d’expérience sur les suivis des impacts des parcs éoliens en mer.
Cécile Chaigneau
Biotope s'associe avec BioConsult et HiDef Aerial Surveying (photo), cette dernière étant spécialisée dans les relevés aériens numériques haute résolution de la faune marine.
Biotope s'associe avec BioConsult et HiDef Aerial Surveying (photo), cette dernière étant spécialisée dans les relevés aériens numériques haute résolution de la faune marine. (Crédits : HiDef Aerial Surveying)

Biotope, spécialiste de l'ingénierie environnementale et écologique basé dans l'Hérault (Mèze), travaille sur un périmètre mondial depuis de nombreuses années. Elle compte 16 implantations en France métropolitaine, quatre en Outre-mer, trois filiales françaises* et sept filiales internationales, et emploie 350 collaborateurs (et 175 dans ses filiales).

Biotope accompagne les acteurs publics et privés dans l'approche environnementale de leurs projets d'aménagement un peu partout sur la planète, et a réalisé un chiffre d'affaires 2021 de 24,6 millions d'euros (annoncé à 30 millions d'euros en 2022).

L'opération que l'entreprise vient de boucler vise à donner au nouvel ensemble une force de frappe européenne décuplée. Biotope annonce ainsi, le 12 septembre, se rapprocher de deux de ses partenaires de longue date : BioConsult SH, cabinet leader en Allemagne sur les questions d'écologie (avec une appétence sur l'offshore), et l'entreprise britannique HiDef Aerial Surveying, spécialisé dans les relevés aériens numériques haute résolution de la faune marine, rachetée en 2016 par Georg Nehls, le directeur général de BioConsult SH.

« Le 9 septembre, Biotope est entrée au capital des deux entreprises, à hauteur de 27%, ce qui est une participation minoritaire mais importante », précise Frédéric Melki, président de Biotope, à La Tribune.

« Que l'écologie reste indépendante »

Les trois entreprises forment désormais un groupe de près de 800 collaborateurs, pour 80 millions d'euros de chiffres d'affaires cumulé.

« C'est une première en Europe dans le secteur, assure Frédéric Melki à La Tribune. Nos métiers sont encore récents et aujourd'hui, ces sujets de biodiversité et d'environnement sont traités par beaucoup de petites entités nationales. Biotope était déjà le plus important acteur européen dédié à ces sujets et ce rapprochement nous donne une dimension supplémentaire, en étant la seule entreprise implantée sur plusieurs pays européens. Nous travaillons sur des enjeux par nature complexes pour des projets qui couvrent une série de sujets biologiques et nous avons mesuré, ces dernières années, combien il était précieux de pouvoir s'appuyer sur des équipes basées dans différentes zones géographiques. C'est notamment le cas dans les nombreux projets d'éoliennes en mer, car par exemple, rares sont les oiseaux marins qui restreignent leur déplacement dans des frontières nationales... C'est aussi une manière de répondre aux préoccupations de nos clients - entreprises, collectivités, services de l'Etat, ONG - dont les projets demandent des capacités techniques, juridiques et économiques adaptées à leurs exigences. L'objectif est de rester indépendant de façon à ce que l'écologie reste indépendante de tout enjeu financier, industriel ou énergétique. »

De son côté, Georg Nehls ajoute que « ce rapprochement nous permet d'augmenter considérablement notre capacité à collecter des données fiables, à grande échelle, à les analyser et ainsi à mieux comprendre les phénomènes de déplacements, d'évitements, et ou de dérangements d'espèces et, in fine, l'adaptation ou non de leurs populations aux infrastructures marines actuelles et/ou futures ».

R&D en commun

L'ambition des trois entreprises : favoriser les synergies (sur les plans géographiques, techniques, juridiques et humains), mettre en commun leurs compétences et leurs technologies et obtenir à grande échelle les données les plus fiables, pour établir des études d'impacts environnementales robustes et permettre la mise en œuvre de projets de conservation de la nature efficients, à l'échelle mondiale.

Les trois entreprises vont désormais intensifier leurs efforts d'innovation dans les domaines de la recherche et du conseil en matière d'écologie afin de « proposer de nouveaux services, répondant ainsi à la demande croissante de décisions fondées sur des données scientifiques en matière de planification environnementale ».

« Nous allons mettre notre R&D en commun, et par exemple approfondir tout ce qui permet de réguler les éoliennes avec des systèmes de caméras pour limiter l'impact sur les oiseaux migrateurs, ou avec des radars pour travailler la question de l'impact du bruit en mer, précise le président de Biotope. Car le développement des énergies renouvelables ne doit pas se faire au détriment de la biodiversité. »

« Ensemble, nous allons considérablement accroître nos efforts pour développer et mettre en œuvre de nouvelles technologies, notamment dans le domaine de l'intelligence artificielle pour l'acquisition de données écologiques », ajoute Georg Nehls.

L'impact des parcs éoliens en mer

L'alliance nouée par les trois entités va notamment travailler sur l'évaluation des enjeux environnementaux et les retours d'expérience sur les suivis des impacts des parcs éoliens en mer.

HiDef Aerial Surveying a notamment mis au point des technologies de pointe - « des caméras haute définition qui sont embarquées dans de petits avions », précise Frédéric Melki - permettant des survols aériens sur de très grandes superficies en pleine mer, afin de collecter des images de haute qualité et d'établir des inventaires précis et très documentés de la mégafaune marine (oiseaux, mammifères marins essentiellement).

Biotope, déjà positionnée sur le secteur des énergies marines renouvelables, a créé un service dédié en 2020, et travaille notamment pour les parcs éoliens de Saint-Brieuc, Saint-Nazaire, Noirmoutier ou Le Tréport. Avec cette alliance, son directeur de ce service, Florian Lecorps, intègre dès septembre 2022 le comité de direction d'HiDef Aerial Surveying pour optimiser les synergies entre
les structures.

Cette nouvelle force de frappe devrait aussi bénéficier aux trois sociétés dans certains appels d'offres nationaux 
ou européens, réservés à des consortiums composés de plusieurs entreprises de plusieurs
 pays et nécessitant une certaine capacité d'investissement.

« Une prise de conscience planétaire »

Cette opération capitalistique intervient dans un contexte très favorable.

« On observe un vrai changement : il y a quelques années, les études d'impact environnemental et écologique se faisaient uniquement dans les pays développés, affirme Frédéric Melki. Aujourd'hui, il existe une prise de conscience planétaire et des pratiques qui se mettent en place indépendamment des réglementations nationales, notamment du fait de l'action déterminée des financeurs : quand un pays qui n'a pas de réglementation environnementale très développée veut faire un projet impactant sur l'environnement, il demande des financements auprès notamment de banques internationales de développement qui ont des règles, des standards et qui exigent des études d'impact de bon niveau. Ça uniformise les méthodologies et permet à des entreprises comme nous de travailler partout dans le monde sans connaître les réglementations locales. Ces quatre ou cinq dernières années, on observe une réelle montée en puissance et ça ouvre un vrai champ des possibles. »

Le dirigeant indique qu'il existe aujourd'hui un seul frein : trouver des compétences. Alors que Biotope annonçait, en juin dernier, le recrutement de 200 personnes, Frédéric Melki souligne les difficultés rencontrées : « C'est notre principal problème car nos métiers sont encore nouveaux. Il y a un énorme décalage entre les besoins partout dans le monde et la disponibilité des ressources humaines. Il existe donc un vrai enjeu de formation. En attendant, il y a surenchères pour recruter et garder les personnes. Je crains la spirale inflationniste sévère... ».

* Aquascope, société basée à Angers et Saint-Mathieu-de-Tréviers, rachetée il y a cinq ans par Biotope et spécialisée dans hydrobiologie ; Soltis, startup basée à Voiron et qui travaille sur la qualité biologique du sol ; Biotope Communication et Edition.

Cécile Chaigneau

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