Jalil Benabdillah : « Il faut faire preuve de courage et de résilience »

Le dirigeant alésien Jalil Benabdillah est, comme d’habitude, sur tous les fronts durant cette crise du Covid-19. P-dg de SDTech, président du réseau régional d’entreprises Leader Occitanie et premier vice-président de l’agglomération d’Alès en charge du développement économique, il fait le point sur la situation depuis Alès, dans le Gard.
Cécile Chaigneau
Jalil Benabdillah, P-dg de SDTech, président de Leader Occitanie et vice-président de l'agglomération d'Alès en charge de l'économie.
Jalil Benabdillah, P-dg de SDTech, président de Leader Occitanie et vice-président de l'agglomération d'Alès en charge de l'économie. (Crédits : Leader Occitanie)

En tant que président de Leader Occitanie (230 membres), entretenez-vous une relation particulière, dans le cadre de la crise actuelle, avec le gouvernement ?

« En effet, en ma qualité de président de Leader Occitanie, je suis aussi référent départemental pour le Gard du club "La France, une chance, les entreprises s'engagent" (créé par le ministère du Travail en juillet 2019, avec comme objectif de mobiliser les entreprises à l'échelle des départements pour l'inclusion par l'emploi, NDLR). La ministre Muriel Pénicaud a organisé un groupe de travail spécial crise, et m'a proposé, à ce titre, de participer aux réunions. Le mot d'ordre du gouvernement, c'est de maintenir l'activité autant qu'on le peut, tout en respectant les gestes barrières de sécurité évidemment, afin de ne pas mettre la France un genou à terre. Muriel Pénicaud a fait observer que la diminution de l'activité en France était plus importante qu'en Allemagne ou en Italie. Il faut maintenir l'activité pour que la sortie soit moins difficile et préserver les emplois... Il faut être vigilant, car le chômage partiel ne sera pas accordé à tout le monde... »

Justement, quelles sont les principales inquiétudes qui remontent des entreprises ?

« La première des inquiétudes, c'est en effet le chômage partiel, tout le monde se demande s'il est éligible. Après le rétropédalage du gouvernement sur la nécessité à maintenir une activité économique, la Direccte a déjà refusé des dossiers. Aujourd'hui, le message, c'est que certains dossiers pourraient être reconsidérés pour assouplir les conditions d'accès au chômage partiel, sous réserve bien sûr d'apporter la preuve que l'entreprise ne peut pas assurer la sécurité des salariés, qu'elle ne peut pas être livrée en matières premières, ou encore que le couvre-feu la met en difficulté. Mais en échange, il y aura des contrôles, y compris a posteriori, afin de vérifier l'honnêteté des démarches... Dans le Gard, les transports Capelle a d'abord maintenu son activité puis a fermé lundi, en conservant une trentaine de chauffeurs pour les urgences. Le dirigeant était inquiet de se voir refuser le chômage partiel. NTN-SNR (fabricant de roulements à bille pour l'industrie automobile, NDLR) à Alès a fermé, et Axens (fabricant de catalyseurs et d'absorbants pour l'industrie pétrolière, NDLR) à Salindres tourne avec 150 salariés sur 450... La deuxième inquiétude des entreprises, c'est le maintien de la trésorerie. On a pu répondre de manière rassurante, mais on lance un message de patience. »

Comment réagit Leader Occitanie ?

« Le 27 mars, nous avons envoyé une newsletter à 3 500 personnes, regroupant l'ensemble des dispositifs de soutien existants... Leader Alès organisé une première réunion en visio-conférence avec 25 chefs d'entreprise, un cabinet d'avocat, Philippe Lamouroux (président du conseil régional des experts-comptables, NDLR) et le directeur de la Banque de France dans le Gard. L'objectif était de répondre aux questions, de partager les pratiques et les problématiques. On reconduit cette réunion tous les jeudis à 14 h et elle est ouverte à toutes les entreprises du bassin, y compris celles qui ne sont pas membres de Leader Alès, pour donner les nouvelles informations. Ceux qui sont intéressés pour se joindre à nous peuvent se manifester par mail auprès de Leader Alès et on leur communiquera les codes d'accès... Nous souhaitons dupliquer cette initiative dans tous les clubs Leader départementaux. »

Quel est le mot d'ordre que vous lancez à ce stade de la crise ?

« Le plus important, c'est la santé des gens. Ensuite, le maintien de l'activité autant que possible. Il faut faire preuve de courage et de résilience. Il y aura des dégâts, mais on a espoir que ça ne dure pas plusieurs mois, même si le retour à la normale sera long. Il faut faire jouer la solidarité, notamment la solidarité intra-entreprises qui doit s'exprimer pour tenir la main à celles qui sont en difficulté. »

Max Roustan a été réélu maire d'Alès le 15 mars dernier, mais les nouveaux conseillers municipaux n'ayant pas été installés, vous êtes encore vice-président de l'agglomération d'Alès en charge de l'économie...

« J'ai appelé un grand nombre de chefs d'entreprise du bassin d'Alès. L'agence de développement économique Alès Myriapolis a créé une adresse mail pour envoyer les informations aux entreprises sur les aides de l'État, de la Région ou localement, et pour apaiser les chefs d'entreprise. La réactivité de la Région a rassuré le monde économique. Au niveau local, Max Roustan réfléchit à abonder, en sortie de crise, un certain nombre de dispositifs, pour les commerçants par exemple. L'agglomération a suspendu ses loyers ou certaines charges pesant sur les entreprises comme les incubateurs, les ateliers-relais. Mais on est dans une phase intermédiaire et il faudra attendre que la nouvelle gouvernance soit installée pour valider les aides. »

Comment s'organise la continuité de l'activité chez SD-Tech (production de poudres fines et ultrafines pour l'industrie), que vous dirigez ?

« Nous avons géré la situation au cas par cas, chaque salarié a été reçu individuellement. Certains sont chez eux pour garder leurs enfants, certains sont en télétravail, d'autres ont pris des congés payés. Nous fonctionnons aujourd'hui avec environ la moitié des effectifs. Nous n'avons pas eu recours au chômage technique, même si l'activité formation et conseil est arrêtée, et l'activité laboratoire réduite. Reste la production, qui représente en temps normal 80 % du chiffre d'affaires. Nous avions anticipé quand la crise battait son plein en Asie. Nous nous sommes organisés avec nos clients grands comptes pour avoir suffisamment de matière première et être autonomes durant un mois à un mois et demi. Cela nous a permis de tenir tout le mois de mars et les produits ont pu être livrés. Nous allons pouvoir continuer une partie du mois d'avril. Nous tiendrons, en faisant le dos rond... »

Cécile Chaigneau

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