Transformation bois : le groupe Neofor va créer une usine autonome en énergie en Lozère

Le groupe français Neofor, spécialisé dans la transformation du bois, annonce le 18 octobre la construction d’une nouvelle usine près de son siège à côté de Mende (Lozère), où il produira des panneaux de bois massif "multicouches" à partir de collage de feuilles de bois. Sa spécificité : adosser ce projet industriel à un pôle énergétique (conçu et exploité par Engie Solutions) lui permettant de valoriser les déchets de bois en chaleur et d’être autonome en énergie.
Cécile Chaigneau
La future usine du groupe lozérien Neofor, spécialisé dans la transformation du bois, sera adossée à un pôle énergétique, produisant de la chaleur et de l'électricité et permettant au site industriel d'être autonome énergétiquement.
La future usine du groupe lozérien Neofor, spécialisé dans la transformation du bois, sera adossée à un pôle énergétique, produisant de la chaleur et de l'électricité et permettant au site industriel d'être autonome énergétiquement. (Crédits : Bonnet & Teissier Architectes)

Construire une usine durable, énergétiquement autonome : c'est le projet annoncé, le 18 octobre, par le groupe lozérien Neofor, spécialisé dans la transformation du bois.

« Neofor souhaite produire des panneaux en bois durable, issu des forêts dans un rayon de 100 km, et à très haute valeur ajoutée, explique Jérôme Lescure, président et CEO du groupe Neofor.
Dans cette usine, nous voulons valoriser l'intégralité de l'arbre et viser l'autonomie énergétique. Car vouloir être industriel en 2022 oblige à repenser le paradigme énergétique... Quand nous avons conçu l'usine, nous nous sommes dit que le paradigme économique de l'industrie, dans lequel l'énergie ne coûte pas cher, était en train de basculer. Les événements ont accéléré cette bascule : par rapport au prix de l'électricité d'aujourd'hui, nous aurons divisé la facture par six ! Alors que le poste énergie explose dans l'industrie, dans cette future usine, notre budget alloué à l'énergie pour les quinze prochaines années est compétitif au monde d'avant... Nous utilisons des énergies renouvelables, nous avons un bon usage de la forêt et pas de coût de transport pour acheminer le bois. Nous nous positionnons pour être référent et modèle sur la conception d'un pôle industriel. »

100.000 m3 de bois, la moitié partant en énergie

Ce qui lui permet de revendiquer cette (future) performance, c'est ce projet de nouvelle usine qui produira des panneaux de bois massif "multicouches" à partir de collage de feuilles de bois (selon un procédé breveté) et qui sera adossé à un pôle énergétique piloté par Engie Solutions avec qui Neofor s'est engagé sur quinze ans.

Créé en 2013 à l'initiative de Jérôme Lescure, le groupe Neofor s'est constitué par acquisitions successives de sites industriels de première transformation du bois et compte aujourd'hui deux sites de sciage en Lozère et un troisième en Haute-Savoie, dans lesquels il emploie 82 salariés pour un chiffre d'affaires annuel de 20,2 millions d'euros en 2021 (22 millions d'euros de prévisionnel pour 2022).


« Dans notre activité traditionnelle, nous produisons environ 90.000 m3 de sciage par an, exclusivement avec des bois de proximité, pour produire des bois destinés à la construction et aux palettes de transport, précise Jérôme Lescure. Pour les panneaux de bois massif "multicouches", nous utiliserons plusieurs essences - et ce sera une caractéristique importante de notre futur outil industriel - à une échelle industrielle qui sera une première mondiale... Ces panneaux se destineront au marché des aménageurs, agenceurs, fabricants de meubles, d'escaliers ou de fenêtres, menuisiers. Nous visons la production d'au moins 50.000 m3 de panneaux, pour 100.000 m3 de bois achetés. Ce qui signifie que la moitié partira en énergie. »

Dans une boucle qui se veut vertueuse, l'industriel valorisera en effet les déchets de bois et autres écorces, jusqu'alors délaissés, pour alimenter une centrale de cogénération biomasse (soutenue par le fonds Chaleur de l'ADEME) de 13 MW de chaleur et 1,5 MW d'électricité. La chaleur fatale sera revalorisée en interne dans le process industriel et le chauffage des bâtiments, et en externe pour apporter de la chaleur décarbonée « bon marché et à prix fixe à un voisin industriel qui fait du bois énergie et est installé à 400 m de nous, ce qui réduit les coûts d'infrastructure », précise Jérôme Lescure.

« L'avenir de l'industrie peut être décarboné »

C'est là qu'Engie Solutions (ex-Cofely) entre en jeu, pour la conception, la construction, l'exploitation et la maintenance du pôle énergétique de la future usine.

« Ce projet, très vertueux, est emblématique de l'innovation qui peut exister autour des métiers du bois, souligne Damien Térouanne, directeur général délégué de Engie Solutions. À travers ce projet et ce partenariat avec Neofor, nous confirmons une nouvelle fois que l'avenir de l'industrie peut être décarboné. La production des utilités peut être vertueuse avec une production sur site qui utilise les rebuts de production de l'industriel, le foncier disponible et la chaleur fatale... En France, Engie Solutions exploite 400 chaufferie-biomasse, avec notamment une belle référence sur le site d'ArcelorMittal à Saint-Chely-d'Apcher. Nous avons aussi plusieurs projets de réseaux de chaleur et rafraîchissement à l'échelle d'un quartier, notamment un gros projet de thalassothermie en livraison au Cap d'Agde dans lequel on récupère les calories de la mer. »

Située à 1.200 m d'altitude, l'usine Neofor comprendra également quelque 8.400 m2 de panneaux photovoltaïques, « sur le toit, au-dessus des espaces de stockage de nos grumes et des produits finis, ainsi que quelques ombrières de parking car on voudrait aussi pousser l'usage de transport plus électrique pour nos salariés », précise Jérôme Lescure. Une installation qui sera également pilotée par Engie Solutions et permettra de produire chaque année 2GWh d'électricité.

La quantité produite par cette centrale photovoltaïque et par la turbine de cogénération couvrira la majorité des besoins en électricité du process, et une partie excédentaire, d'environ 1GWh/an, sera réinjectée dans le réseau public.

20 millions d'euros

Le pôle énergie à lui seul nécessitera un investissement de 20 millions d'euros. L'objectif de mise en service de l'usine est fixé au dernier trimestre 2024. L'usine permettra, à terme, de créer près de 80 emplois directs locaux dans la filière bois.

« Nous aurons 70% des emplois dès le démarrage de l'usine, et ensuite une montée en puissance progressive avec l'augmentation des volumes traités, pour atteindre un régime de croisière en trois ou quatre ans », annonce Jérôme Lescure. Ce sera un challenge ! Nous avons déjà commencé des partenariats avec des écoles, notamment l'université de Montpellier et son master Bois, pour se mettre en face d'une population de jeunes qualifiés qui s'intéressent à notre industrie. Nous avons déjà recruté un jeune issu d'HEC pour ce projet. »

Cécile Chaigneau

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