Le créateur olfactif Arthur Dupuy rebondit sur de nouveaux segments clients

Spécialiste de la conception de signatures olfactives et aromatiques, l’entreprise montpelliéraine Arthur Dupuy consolide une nouvelle levée de fonds pour intensifier son développement sur le BtoC. Il séduit notamment les musées, les théâtres ou encore le festival de Cannes et les JO Paris 2024.
Arthur Dupuy a fondé l'entreprise éponyme spécialisée dans le marketing olfactif, qui séduit les marques, les transports et l'hôtellerie-restauration, mais aussi les musées ou les théâtres.
Arthur Dupuy a fondé l'entreprise éponyme spécialisée dans le marketing olfactif, qui séduit les marques, les transports et l'hôtellerie-restauration, mais aussi les musées ou les théâtres. (Crédits : DR)

Un floral rosé, des notes de framboise, de pin maritime et de cèdre... Bienvenue au lycée Jules Ferry de Montpellier qui vient de collaborer avec la société Arthur Dupuy pour élaborer sa propre signature olfactive. Capable d'incarner l'âme d'un lieu en faisant appel aux émotions et aux souvenirs, le marketing olfactif fait flores.

« Dans le monde hyper visuel, digitalisé, dans lequel nous vivons, le sens olfactif permet de retisser du lien avec le réel et notre environnement, explique Arthur Dupuy, dirigeant de la société éponyme (12 collaborateurs). Apporter cette dimension invisible est notre défi. Notre différenciation concurrentielle est d'être capable d'apposer une signature olfactive sur une multitude de supports, de production ou de diffusion. »

Du musée au théâtre

Hébergée au sein des laboratoires de l'Université de Montpellier depuis sa création en 2015, la société Arthur Dupuy (dont le siège administratif est depuis peu à Mauguio) réalise ses compositions olfactives originales et sur-mesure à destination principalement de trois secteurs : les marques, les transports et l'hôtellerie-restauration.

Si l'hôtel de luxe NoMad London, le Domaine de Verchant à Montpellier, le palace Belle Plage à Cannes ou une marque de chaussures de luxe dans les Émirats Arabes Unis ont fait appel à Arthur Dupuy pour leur signature olfactive, plus étonnante est l'appétence de l'art pour les fragrances. A l'instar du Musée Paul Valery à Sète, pour lequel Arthur Dupuy a conçu une fragrance, Eau de Sète, rappelant la mer et l'identité de Sète à partir des déités de Paul Valery dans ses écrits.

« De plus en plus de musées ou de théâtres font appel à nous, confirme Arthur Dupuy. Nous travaillons en ce moment avec le Théâtre de Nîmes qui souhaite imprégner le spectateur de senteurs lors d'un spectacle de théâtre burlesque. Le théâtre Molière de Sète vient également de nous solliciter pour recréer l'ambiance de ce lieu unique. »

JO 2024 à l'horizon

D'autres projets sont en cours, comme la création d'un parfum autour du liège de la forêt domaniale de l'Esterel pour le festival de Cannes, une édition spéciale du flacon de l'eau de Sète en soutien au skipper sétois Nicolas Rouger pour son prochain Vendée Globe, ou encore la collaboration avec une marque de cosmétique régionale haut de gamme, travaillant sur des produits actifs autour du riz de Camargue.

Quant au secteur du transport, il a pris du retard mais devrait décoller.

« Nous nous étions positionnés sur un programme pilote de signature olfactive de la ligne de tramway French Tech qui n'a pas abouti mais la métropole de Montpellier vient de nous solliciter à nouveau, avance le designer olfactif. Nous avons également répondu à une demande de l'agglomération de Grenoble souhaitant mettre en avant ses transports verts. Enfin, nous sommes très fiers de faire partie des deux présélectionnés par l'Ile-de-France mobilité pour les JO de 2024. »

Pour autant, la crise sanitaire a fortement impacté la société montpelliéraine, en particulier sur le segment CHR (- 45%). Pour assurer sa pérennité, Arthur Dupuy a fait évoluer sa stratégie en se positionnant sur le BtoC et en multipliant les collaborations avec des marques, comme avec la Box d'Inès de la Fressange.

300.000 euros pour la R&D

« La crise a été virulente, commente le dirigeant. Aussi, nous avons entièrement refondu notre site et boosté l'ensemble de nos quatre collections dédiées au grand public : Eau de Montpellier, Cologne de l'Ecusson, Terre d'Afrique et Le Portrait. Cette stratégie a bien fonctionné car nous avons clôturé l'année à + 6%. »

Elaborée à partir d'un partenariat écoresponsable engagé avec le Gabon, la ligne Terre d'Afrique, sélectionnée pour le Sommet France-Afrique (en octobre 2021 à Montpellier), va être complétée très prochainement d'une collection de produits corporels (à base de résine de l'Ogooué). Le fabricant prévoit d'élargir sa gamme de cosmétiques et de développer de nouveaux produits tels que des rideaux ou des poignées de portes olfactives.

Présente sur le territoire français via un réseau de distributeurs (pharmaciens, concept-stores, etc.), la marque vise désormais l'Europe.

Après avoir déjà opéré deux levées de fonds (2018 et 2019), Arthur Dupuy est sur le point de boucler sa troisième levée de fonds de 300.000 euros, toujours avec le même investisseur, Solignac Industries. Objectif : transformer et industrialiser ses projets R&D.

Des freins réglementaires

La société montpelliéraine propose également un langage aromatique à travers la création d'arômes uniques pouvant se décliner dans des eaux pétillantes, des tablettes de chocolat ou des cocktails. Elle travaille par exemple avec la marque Cockorico pour introduire des arômes et booster les cocktails. Et s'apprête à lancer, dès le mois d'avril, un vin rosé assemblé avec un négociant, dont le bouchon intègrera les molécules odorantes du vin.

Face à l'exigence aiguisée de ses clients, Arthur Dupuy cherche à se démarquer des pistes classiques du marché, grâce notamment aux sourcing de matières confidentielles. La société mise ainsi beaucoup sur la valorisation des produits d'espèces végétales (les concombres par exemple).

« Pour 2022, notre objectif est de commercialiser des produits made in France, 100% naturels, issus d'actifs réutilisés du monde des déchets alimentaires », confie le dirigeant.

Si la palette olfactive n'a pas de limite, les freins réglementaires, eux, posent question : « Les décrets européens se multiplient, notamment de la part de la législation IFRA (International Fragrance Association, NDLR) qui nous met des bâtons dans les roues. Notre laboratoire passe un temps fou sur ces notions de toxicologie. Nous devenons des chimistes... Du coup, nous menons des projets d'accompagnement pour certains parfumeurs indépendants qui n'ont pas la chance d'avoir de laboratoire et surtout, qui n'ont pas la connaissance scientifique de mon associée, Isabelle Parrot, pour mener à bien leur projet. Notre métier, qui à la base était un métier de création, est en train d'évoluer ».

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