Innovation : avec PharmIA, l’intelligence artificielle fait son entrée dans la pharmacie hospitalière

PharmIA opère le premier déploiement de sa plateforme digitale intelligente au service du pharmacien hospitalier au CHU de Montpellier. Objectif : faciliter l’analyse et le contrôle des prescriptions médicales. PharmIA, dispositif médical innovant, est le fruit d’une collaboration de deux ans et demi, entre le centre hospitalier de Valenciennes et le CHU de Montpellier notamment.
Cécile Chaigneau
PharmIA est une plateforme digitale intelligente au service du pharmacien hospitalier pour faciliter l'analyse et le contrôle des prescriptions médicales et la détections de situations à risques.
PharmIA est une plateforme digitale intelligente au service du pharmacien hospitalier pour faciliter l'analyse et le contrôle des prescriptions médicales et la détections de situations à risques. (Crédits : CHU Montpellier)

La pharmacie hospitalière est une vaste machinerie humaine qui analyse et administre chaque jour des centaines de prescriptions médicales au sein d'un centre hospitalier comme Montpellier. Le 16 septembre, l'établissement de soins annonce le premier déploiement en son sein de PharmIA, une plateforme digitale intelligente au service du pharmacien hospitalier pour faciliter l'analyse et le contrôle des prescriptions médicales et la détections de situations à risques iatrogènes*.

Si PharmIA est advenue, c'est parce que le Dr. Etienne Cousein, Chef de Pôle Pharmacie au centre hospitalier de Valenciennes, a fait un constat : « Le métier de pharmacien hospitalier, c'est analyser les prescriptions, les valider et faire d'éventuels ajustements nécessaires. Il faut chercher, fouiller le dossier médical de chaque patient. Or la pharmacie hospitalière est très en retard sur la digitalisation et le pharmacien hospitalier n'a pas d'outil adapté... On a donc imaginé PharmIA, fruit de discussions au sein de la communauté de pharmaciens ».

C'est ainsi que l'intelligence artificielle (IA) fait son entrée dans ce domaine de la pharmacie hospitalière. Frédéric Couriol, le président de l'entreprise éponyme PharmIA veut être précis : « Du point de vue des termes réglementaires, on parle plutôt d'algorithme évolutif que d'IA »...

« Une importante charge mentale »

La plateforme PharmIA n'a évidemment pas vocation à se substituer à l'homme, mais à l'assister dans la prise de décision, contribuant à répondre aux défis de la pharmacie hospitalière en termes de sécurité, d'efficacité et d'efficience organisationnelle. Les moteurs analytiques de dernière génération de PharmIA permettent en effet de détecter les cas les plus critiques parmi les ordonnances soumises aux pharmaciens hospitaliers et de faciliter leurs investigations en temps réel.

« PharmIA permet de rapidement voir à quel patient on a affaire, de comprendre la stratégie médicamenteuse en place, et d'avoir sur la même fenêtre tous les éléments pour prendre une décision, avec notamment des systèmes d'alerte sur certains médicaments », indique le Dr. Etienne Cousein.

Ce dispositif médical innovant apporter des solutions aux pharmaciens hospitalier et leur permet de se concentrer sur leur cœur de métier, « libérant du temps de cerveau très compétent pour le réallouer au bénéfice de l'établissement et du patient », souligne Philippe Arany, directeur général de Quinten, entreprise parisienne partenaire de PharmIA.

« Tout ce qui est analysable automatiquement doit l'être pour libérer l'humain là où on a besoin de lui », confirme le Pr. Antoine Avignon, Chef de pôle au CHU de Montpellier.

« Dans le monde hospitalier, il existe un flux important d'ordonnances émises par de nombreux prescripteurs, ce qui demande donc beaucoup d'organisation et une importante de charge mentale pour analyser ces prescriptions, explique le Dr Cyril Breuker, maître de conférences des universités et praticien hospitalier du CHU Montpellier. On a besoin de solution pour prioriser les prescriptions et indiquer celles où il y a le plus de risques. Au-delà de la réduction du risque de iatrogénie, PharmIA permettra de réorganiser nos journées, d'améliorer le flux de médicaments et donc d'améliorer les délais d'administration des médicaments et donc la prise en charge des patients. »

Capturer le comportement des pharmaciens

Autre bénéfice attendu : celui du principe d'apprentissage permis par l'intelligence artificielle.

« On espère que les ordinateurs apprendront des pratiques des pharmaciens et que les pharmaciens apprendront grâce à l'outil par l'amélioration de la prise en charge, déclare le Dr. Etienne Cousein. On a par exemple du mal à réévaluer la place précise de chaque médicament dans les stratégies de prises en charge. Grâce à PharmIA, on pourrait redécouvrir l'intérêt d'un médicament ou mieux appréhender les effets désirables. Avec l'IA, on aura accès à un volume de données de plus en plus grand et au fur et à mesure, l'IA nous permettra d'avoir une idée plus précise du bon usage de certains médicaments. »

La plateforme enregistrant les validations ou invalidations d'alertes par les pharmaciens, les différents paramètres qu'ils retirent ou ajoutent, ou encore leurs recommandations, l'IA capturera le comportement des pharmaciens et mettra ces informations à disposition interroger les pratiques.

« PharmIA permettra aux équipes de pharmaciens d'être en apprentissage accéléré », espère Etienne Cousein.

En discussion avec l'hospitalisation privée

La création de PharmIA et de sa plateforme intelligente est le fruit d'une histoire collaborative entre le monde de la science de la donnée et le monde de l'hôpital : l'association de compétences entre le centre hospitalier de Valenciennes, le CHU et l'Université de Montpellier et la SATT AxLR (société d'accélération et de transfert technologique), dans toutes les phases du développement produit, de la recherche à la conception, jusqu'à l'intégration au système d'information de l'hôpital (SIH) en passant par l'expertise juridique de médicale.

La SATT AxLR a mis en place un outil de financement initial basé sur un partenariat public/privé, agrégeant les apports des quatre partenaires initiaux CHV, CHU Montpellier, SATT et l'entreprise Quinten, spécialiste de la data science en santé (qui a développé la plateforme technologique).

« PharmIA est un exemple de consortium qui a su réunir des partenaires de l'entreprise et des chercheurs du secteur académique, souligne Philippe Nérin, le président de la SATT AxLR. C'est un prototype intéressant d'accélération des modèles de croissance. »

Philippe Arany, chez Quinten parle même de « prouesse en raison d'un attelage hétéroclite public-privé, de délais de développement et de coûts ». Sur ce dernier point, il reste discret, consentant à annoncer « plusieurs millions ».

PharmIA, dont le siège est à Montpellier, est en train de recruter ses premiers salariés, indique Frédéric Couriol. Marqué CE en 2021, le dispositif médical PharmIA, désormais opérationnel au CH de Valenciennes et au CHU de Montpellier, est aussi distribué par de grands éditeurs de SIH.

« Nous sommes en discussion avec l'hospitalisation privée, ajoute Frédéric Couriol. Dans les établissements privés, ils n'ont pas forcément les ressources nécessaires en pharmacie hospitalière donc nous pourrions aussi apporter un service d'analyse des prescriptions hospitalières. »

* La iatrogénie médicamenteuse désigne l'ensemble des effets indésirables provoqués par la prise d'un ou plusieurs médicaments.

Cécile Chaigneau

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Commentaire 1
à écrit le 16/09/2021 à 18:46
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Cool .. de moins en moins d interactions humaines. !! Mais pour notre bien, évidemment 😁

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