Jean-François Delfraissy, le président du Conseil scientifique, a déclaré le 16 décembre que les faibles températures et l'humidité risquaient de jouer en faveur du virus. Si cette corrélation entre les données météorologiques et la propagation du virus avait déjà fait l'objet d'hypothèses, l'entreprise montpelliéraine Predict Services apporte aujourd'hui des éléments factuels : même si les éléments climatiques ne peuvent pas être les seuls paramètres à considérer dans la transmission du virus, les études réalisées par l'entreprise montpelliéraine attestent indéniablement de la relation entre les deux.
Spécialisée dans le risque hydrométéorologique et la prévention des risques naturels, Predict Services (détenue à parts égales par Airbus, Météo France et BRL), accompagne les communes, les entreprises et les particuliers dans la prise de décisions durant un épisode météorologique extrême.
« En février et mars, quand la pandémie a démarré, nous avons été surpris par l'hétérogénéité de la propagation du virus, se souvient Alix Roumagnac, le président fondateur de Predict Services. Nous avons voulu mieux comprendre et éventuellement apporter une contribution dans notre domaine de compétences, c'est à dire les données du risque lié au climat, et nous avons monté un groupe de travail. »
Un index simulant les influences potentielles de la météo
Pour analyser les relations entre éléments climatiques et transmission du Covid et déterminer quelle influence peut avoir le climat, les ingénieurs experts de l'entreprise récupèrent les données d'une étude du MIT (Massachusetts Institute of Technology), répertoriant les cas de Covid dans le monde, ainsi que des variables météorologiques comme les températures, le taux d'humidité ou le vent.
« Cette étude a été le facteur générateur, déclare Alix Roumagnac. Elle disait que 90% des infections se produisaient dans des conditions précises (dans des régions où la température se situe entre 3 et 17 degrés, et où l'humidité absolue est de 4 à 9 grammes par mètre cube, ndlr). Clairement, la température et l'humidité jouent un rôle dans la persistance des gouttelettes dans l'air. Mais les conclusions de l'étude nous semblaient un peu trop "tout ou rien"... Nous avons construit notre propre index simulant les influences potentielles de ces paramètres, avec les données de Météo France à partir du mois de janvier, croisées avec les données de contamination de Santé Publique France. Nous avons réalisé le même travail au niveau mondial avec les données Copernicus, croisées avec données de l'université Johns Hopkins (qui recense en temps réel la situation de la pandémie dans le monde, ndlr). »
Ce que font les gouttelettes
Une fois l'index opérationnel, les équipes de Predict Services le comparent avec les situations régionales de l'épidémie en France. Et ça colle. Ailleurs en Europe ? Les conditions climatiques de février et mars confirment également. C'est l'été dans l'hémisphère sud ? Mêmes constats, l'index confirme.
Puis l'été est arrivé en France, suivi de la redoutée deuxième vague. Là aussi, l'index matche. En octobre, les températures chutent en dessous des normales saisonnières et, soumise à l'index, la cartographie bascule, confirmant que là où les conditions climatiques s'y prêtent, la propagation du virus opère.
Que dit l'index ? Que lorsqu'il fait froid et sec, les gouttelettes n'ont pas capacité à rester en suspension et tombent au sol rapidement. Que s'il fait chaud et sec, elles s'évaporent. Que s'il fait chaud et humide, elles s'agglomèrent et tombent. Que lorsqu'il pleut, la pluie a tendance à laver l'atmosphère et elles tombent au sol. Et que lorsque les températures se situent entre 0 et 8° et qu'il fait relativement humide, les gouttelettes restent longtemps en suspension. C'est donc bien à la fin de l'automne et durant l'hiver en France, mais aussi en Espagne ou en Italie, que les conditions météorologiques seraient les plus favorables à la transmission du virus.
Olivier Veran très intéressé
Pour Alix Roumagnac, les paramètres météorologiques sont des facteurs aggravant ou minorant. Mais il se veut prudent : « Nous avons passé des jours et des jours à croiser et recroiser les données. L'index n'explique pas tout mais ce sont des signaux. Il y a des exceptions qui confirment la règle : le Brésil est en vert sur nos cartes alors que les conditions météo sont favorables à la propagation et qu'on sait en effet qu'il y a eu d'importantes contaminations. Mais si on fait le carnaval sans mesure de distanciation, le virus se propage... »
Afin d'éclairer les prises de décisions, l'entreprise a mis le fruit de ses recherches à disposition des autorités compétentes : le ministère de la santé, la Direction générale de la santé (DGS), Santé publique France ou l'Institut Pasteur. Le ministre de la Santé Olivier Veran a pris le temps d'échanger durant une demi-heure avec Alix Roumagnac et lui a confirmé son intérêt et l'intégration de ces éléments dans le processus de gestion de la pandémie.
« On est prêt à poursuivre ce travail, il faudra le vérifier, le compléter et lever des incertitudes », ajoute Alix Roumagnac.
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