Créée en juillet 2022 à l'initiative de la PME gardoise Arcadie (spécialisée dans la production et le négoce d'épices, d'aromates et de plantes bios), Windcoop, première compagnie maritime de transport décarboné organisée en coopérative (Scic), a vocation à construire et affréter un cargo porte-conteneurs à voile qui rouvrira, au rythme de cinq rotations par an, une route maritime directe entre Madagascar, où Arcadie s'approvisionne majoritairement en épices (environ 300 tonnes d'épices par ans, soit 25 conteneurs), et un port de la Méditerranée française qui reste à déterminer. Windcoop a été fondée avec le Lorientais Zéphyr & Borée (navires de commerce innovants bas carbone) et le président d'Enercoop Julien Noé.
Le cargo porte-conteneurs, long de 85 mètres pour une capacité d'une centaine de conteneurs d'un tonnage maximal de 1.400 tonnes (et 12 passagers), devait nécessiter un financement initial de 20 millions d'euros. Mais le contexte économique mondial (hausse des coûts des matières premières, de l'énergie et des taux d'intérêt) a contraint les porteurs du projet à réviser l'enveloppe globale : « Nous sommes en train de travailler dessus et nous annoncerons prochainement le montant révisé », confirme à La Tribune Matthieu Brunet, président d'Arcadie et président du conseil d'administration de Windcoop.
6,2 millions d'euros sur le point d'être sécurisés
La coopérative souhaitait sécuriser 30% du financement en capital, soit 6 à 7 millions d'euros, dont 3 millions via un financement participatif, 2 millions d'euros investis par Arcadie et un complément auprès de fonds d'investissement éthiques et solidaires. En décembre 2022, Windcoop, par le biais d'une campagne de financement participatif, avait ainsi réussi à lever 2,62 millions d'euros. La campagne s'est poursuivie (et se poursuit encore, indique Matthieu Brunet), et la coopérative a continué d'avancer sur le dossier de financement.
En cette rentrée, Windcoop annonce avoir levé plus de 4,5 millions d'euros, via la collecte en financement participatif, des investisseurs professionnels, dont Arcadie, Lobodis (torréfacteur breton), Ethiquable (coopérative gerçoise spécialisée dans la vente de produits biologiques issus du commerce équitable), Prova (entreprise spécialisée dans la fabrication d'extraits et d'arômes bruns, notamment de vanille) et le fonds d'investissement Mer Invest (créé par la Banque Populaire Grand Ouest et sa marque Crédit Maritime).
« Pour aller voir les banques, il faut apporter 20% du total de l'investissement, donc nous visions les 5 millions d'euros, auxquels il faut ajouter la trésorerie du démarrage du projet, soit 6 à 7 millions d'euros, précise Matthieu Brunet. Nous avons signé avec les fonds d'investissement Mer Invest et la SIDI (Solidarité Internationale pour le Développement et l'Investissement, NDLR), et avec de futurs chargeurs du cargo porte-conteneurs dont Arcadie, Lobodis, Ethiquable et Prova, soit aujourd'hui un total de 5 millions d'euros. Avec ce qui est dans les tuyaux, nous allons atteindre les 6,2 millions d'euros... Nous avons déjà des accords de principe de la part d'un pool bancaire (dont il tait les noms pour le moment, NDLR) sur le déblocage d'un prêt. Ce qui donnera le rythme, c'est la signature avec le chantier naval, qui devrait intervenir début 2024. Nous sommes dans les dernières négociations... Ensuite il faudra compter environ vingt mois pour la construction du cargo. »
Le dirigeant concède que le projet a ainsi pris « une petite année de retard » sur sa feuille de route initiale. La première traversée entre la France et Madagascar qui était prévue en 2025 est désormais décalée à début 2026.
En décembre 2022, Louise Chopinet, directrice générale de Windcoop, indiquait à La Tribune que Windcoop disposait « de suffisamment d'intentions de la part de chargeurs pour remplir le navire dans le sens France/Madagascar, notamment avec des marchandises de bouche - épices, vanilles, fruits, crevettes, chocolats - ainsi que du textile et des huiles essentielles ».
« Le modèle capitaliste va se verdir mais ça ne suffira pas »
En attendant, afin d'ancrer davantage encore sa philosophie de coopérative maritime - « Tout ce qui est du domaine des infrastructures et des grands services est habituellement aux mains de l'Etat ou de multinationales privées, or nous considérons que le citoyen devrait avoir un droit de regard et de participation pour dire comment il souhaite que ses marchandises soient transportées », déclarait Matthieu Brunet pour expliquer ce choix -, Windcoop vient d'annoncer qu'elle rejoignait le collectif français de coopératives les Licoornes
« L'ancien monde croit encore qu'en créant des startups qui consomment les ressources naturelles, on va sauver le monde, mais nous, nous pensons que c'est la coopération et l'entraide qui sauvera le monde, lance Matthieu Brunet. Nous voulons rappeler que les entreprises coopératives peuvent adresser des marchés de masse, que c'est une solution primordiale pour affronter les défis qui nous attendent. Le modèle capitaliste va se verdir mais ça ne suffira pas... »
Créée en 2021, Les Licoornes rassemble à ce jour treize des coopératives opérant dans de différents secteurs, œuvrant pour donner accès à une consommation responsable et proposant aux citoyens « de prendre part aux décisions économiques clés via leur gouvernance démocratique et partagée ».
« Les Licoornes ne sont pas qu'une magnifique vitrine pour diffuser notre message sur l'importance de verdir le transport maritime, c'est aussi un très bel outil politique ! », affirme Alice de Cointet, directrice opérationnelle de Windcoop, qui compte à ce jour cinq collaborateurs.
Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !