Port-la-Nouvelle : les premiers chantiers de mutation du port de commerce sont livrés

Le 23 juin, la Région Occitanie, propriétaire du port de Port-la-Nouvelle (Aude), et ses partenaires d’investissement inauguraient officiellement la nouvelle concession portuaire, opérationnelle depuis un an, ainsi que la livraison des premiers chantiers de transformation de l’infrastructure en futur cœur névralgique de l’éolien flottant en Méditerranée... L’occasion de rassembler tous les acteurs économiques et industriels, dont les opérateurs des fermes-pilotes d’éolien en mer flottant mais aussi les candidats aux futurs parcs commerciaux.
Cécile Chaigneau
Le terminal éolien qui servira de base arrière aux projets de fermes-pilotes d'éoliennes en Méditerranée a été livré sur le port de Port-la-Nouvelle.
Le terminal éolien qui servira de base arrière aux projets de fermes-pilotes d'éoliennes en Méditerranée a été livré sur le port de Port-la-Nouvelle. (Crédits : DR)

Il y a un an qu'a été créée la SEMOP Port-la-Nouvelle, titulaire de la concession portuaire pour les 40 prochaines années et dont la mission est l'aménagement, l'exploitation, la gestion et le développement du port de commerce.

Objet de gouvernance unique en France pour un port de commerce et opérationnelle depuis le 1er mai 2021, cette société d'économie mixte à opération unique associe la Région Occitanie (34% du capital) et la Banque des Territoires (15%) à un opérateur économique baptisé Nou Vela (51%), groupement d'entreprises comprenant des opérateurs privés (Deme Concessions, Euroports Group BV), le fond flamand Epico, l'entreprise héraultaise Qair et la CCI de l'Aude. C'est Didier Codorniou, premier vice-président chargé de la Méditerranée à la Région Occitanie, qui en assure la présidence.

A l'annonce de création d'une SEMOP associant dans un partenariat public-privé des collectivités et des entreprises, de nombreuses voix s'étaient élevées, dénonçant une privatisation de la gestion du port. Pour faire barrage à toute nouvelle controverse, ce 23 juin, la présidente de la Région Occitanie, Carole Delga, martèle : « nous avons une minorité de blocage ! »...

« Sans ces investissements, Port-la-Nouvelle était condamné à l'immobilisme !, déclare l'élue le 23 juin. La SEMOP est l'illustration du partenariat de la force publique régionale et des entreprises privées au service de la souveraineté alimentaire, industrielle et énergétique. C'est ma conception de l'action publique : le volontarisme politique associé au professionnalisme des entreprises. »

Eolien en mer, hydrogène vert et trafic de vrac

Le 23 juin, un point d'étape était proposé par la Région, l'occasion d'inaugurer officiellement la SEMOP et sa première année de fonctionnement, et de visiter le port et le nouveau terminal éolien, ainsi que le chantier des digues en cours de construction. Etaient notamment présents les candidats aux futurs parcs commerciaux d'éoliennes en mer...

Le slogan de la présidente de la Région Occitanie, Carole Delga : « Faire de Port-La Nouvelle le port de la transition énergétique de la Méditerranée occidentale ».

Le port de commerce de Port-la-Nouvelle se situe au 15e rang des ports français et le 3e port méditerranéen français) en terme de tonnages, avec 1,5 à 2 millions de tonnes par an, majoritairement des  hydrocarbures et des vracs secs (minéraux), ainsi que des céréales à l'export.

L'arrivée de l'activité éolienne en mer via les deux fermes-pilotes au large de Gruissan et de Leucate/Le Barcarès (Eolmed et EFGL-Eoliennes Flottantes du Golfe du Lion, portées par Qair et Engie Green, soit six éoliennes pour une production de 30 MW) et plus tard l'un des deux parcs commerciaux en Méditerranée (l'appel d'offres a été lancé le 14 mars dernier par Jean Castex, alors Premier ministre), devrait changer la donne.

La Région porte en effet l'ambition d'y structurer un hub autour de l'éolien en mer flottant, ainsi qu'un hub de l'hydrogène vert avec de la production - une usine de production y sera implantée par la société de projet Hyd'Occ (AREC-Région Occitanie et Qair), avec un démarrage de production attendu en 2024 - et de l'importation (en provenance d'Oman et du Maghreb notamment).

Autre projet : repositionner le pôle de vracs solides et de marchandises diverses et renforcer le pôle de vracs liquides, tout en développant l'acheminement de biocarburants et des carburants de nouvelle génération.

La 1e tranche du terminal éolien livrée

Pour opérer cette mutation, un chantier d'envergure (quatre ans) est en cours, pour lequel la Région mobilise 234 millions d'euros sur la 1ère tranche de travaux, aux côtés du Département de l'Aude et de l'Agglomération du Grand Narbonne (30 millions d'euros) et de l'Etat (32 millions d'euros).

L'extension de l'infrastructure porte d'abord sur la construction d'une nouvelle digue nord de 2,5 km et le prolongement de la digue sud existante sur 600 m (livrables en 2023). La fabrication des acropodes (blocs de béton qui constituent la digue) est assurée par une usine installée par le groupe Lafarge sur le port, soit quelque 17.500 acropodes à terme.

L'extension, c'est aussi la construction d'un terminal éolien constitué d'un quai colis lourd de 250 m (dragué à -11 m), adossé à un terre-plein de 11 hectares. C'est ici que sera installée la base arrière des deux projets de fermes-pilotes d'éoliennes en mer flottantes (livrables en 2025) à partir de 2022, puis du projet de ferme commerciale (horizon 2028). Une extension de ce terminal éolien est déjà prévue sur 23 ha supplémentaires, dotés d'un nouveau linéaire de quai de 300 m et de zones de stockage et d'assemblage d'éoliennes.

La SEMOP poursuivra ces travaux d'aménagement, avec notamment la livraison en 2025 d'un terminal multi-vracs doté de deux nouveaux quais et d'un nouveau poste de déchargement des vracs liquides dans un nouveau bassin de 14.5 m de tirant d'eau.

Enfin, une zone d'activité logistique portuaire de 70 ha sera livrée en arrière du port en 2025. Le port, dont la zone historique est déjà connecté au réseau ferroviaire, sera ainsi entièrement équipé de voies ferrées.

Selon la Région, 200 personnes travaillent sur les chantiers actuellement, « et à terme, ce sont 1.500 emplois qui seront créés sur le port », affirme Carole Delga.

Lafarge a installé sur le port de Port-la-Nouvelle son usine de fabrication d'acropodes, gros blocs de béton qui constituent la digue.

Lafarge a installé sur le port son usine de fabrication d'acropodes, gros blocs de béton qui constituent la digue (© Cécile Chaigneau).

Doubler le trafic portuaire

Maintenant que le quai éolien et son terre-plein (35 millions d'euros d'investissement) sont prêts, la construction des flotteurs de la ferme-pilote Eolmed va pouvoir démarrer. Des flotteurs grands comme des immeubles (45 m de longs et 17 m de haut) dont les éléments de base seront produits près de Figeac (Lot) par l'entreprise Matière. Ce sera pourtant le projet EFGL qui installera la première éolienne en mer, en 2023 selon les prévisions établies, Eolmed suivant en 2024.

Dans une seconde phase, ce sont les entreprises privées du groupement Nou Vela qui investiront sur le port pour le doter d'équipements à même de porter le développement de leurs activités.

« Un port est un écosystème local et un écosystème international qu'il faut faire en équipe car c'est multidimensionnel et multisecteur, souligne Steven Bouckaert, président du consortium Nou Vela (et directeur général de Deme Concessions). Il existe peu de capacités portuaires entre Barcelone et Marseille aujourd'hui. Le projet qu'on est en train de réaliser ici est le plus grand projet portuaire après Port 2000 au Havre, réalisé il y a vingt ans... Port-la-Nouvelle est un port d'avenir qui répondra à de nombreuses problématiques françaises ou mondiales, notamment en matière d'énergie et d'approvisionnements. »

Le directeur général de la SEMOP, Yann Wickers, renchérit : « Nous misons sur le vrac liquide, nous voulons faire croître les volumes de céréales à l'export et augmenter le vrac traditionnel. Nous voulons doubler le trafic portuaire, qui est aujourd'hui d'un peu moins de deux millions de tonnes : l'objectif est de le porter à 6 millions de tonnes d'ici quinze ans et les 10 à 12 millions de tonnes à terme. Ces modernisations du port vont créer un appel d'air sans créer de concurrence avec les autres ports de la région, à Sète et Port-Vendres ».

Ces investissements privés, qui s'élèveront à quelque 300 millions d'euros, seront déployés à partir de 2025 ou 2026, et Steven Bouckaert l'affirme, « le dossier financier est bouclé ».

Cécile Chaigneau

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