« Il va falloir accepter la "dé-perfusion" ! » (Samuel Hervé, Medef)

Un an après le premier confinement qui avait mis l’économie française à l’arrêt, le Medef fait un état des lieux des forces (et des faiblesses) du tissu économique héraultais. Fragilisation de certaines entreprises, activités à l’arrêt pour d’autres, modèles bouleversés, organisations du travail modifiées, mode de management secoués, incertitudes et manque de visibilité. La crise sanitaire laisse des traces auxquelles le monde patronal doit s’adapter. Le point avec Samuel Hervé, président du Medef Hérault Montpellier.
Cécile Chaigneau
Samuel Hervé, président du Medef Hérault Montpellier.
Samuel Hervé, président du Medef Hérault Montpellier. (Crédits : DR)

Il commence par une note positive : « Début 2020, le baromètre des investissements et des recrutements était positif, ce qui signifiait que l'état de santé des entreprises était satisfaisant, avec des trésoreries correctes. Ça a permis de bien supporter la 1e phase de confinement. Ensuite, les mesures du gouvernement ont constitué un amortisseur important ».

Le 18 mars 2021, Samuel Hervé, le président du Medef Hérault Montpellier (800 adhérents), tire le bilan d'une année de crise sanitaire. Et alors que cette école de pensée économique n'est habituellement pas la tasse de thé du syndicat patronal, il loue ces « mesures keynésiennes » qui sont venues soutenir l'économie française par des larges perfusions financières, alors que tout s'arrêtait...

« Dans l'Hérault, 14.957 PGE (prêts garantis par l'État, NDLR) ont été accordés, pour 2,261 milliards d'euros (chiffre au 5 mars 2021, NDLR), précise Samuel Hervé. 99% des entreprises qui souhaitaient un PGE y ont eu accès. »

Appel à la solidarité bancaire

Selon les statistiques nationales du Medef, « aujourd'hui, on est revenu à 91% de l'activité ante-crise sanitaire », annonce-t-il, « avec des réalités diverses évidemment, notamment pour le secteur de l'hôtellerie-restauration ».

Cependant, le patron des patrons héraultais pointe l'inquiétude persistante des entreprises : « Aujourd'hui, on manque de visibilité sur l'état de la reprise économique, et il y a un enjeu majeur à rapidement vacciner pour permettre le redémarrage de certaines activités, comme retourner dans les restaurants, les hôtels ou les salons ».

L'autre point d'inquiétude, « d'angoisse » même, plaide Samuel Hervé, c'est la perspective de devoir rembourser les PGE alors que les entreprises n'ont pas forcément retrouvé un niveau d'activité normal.

« Ce sont des sujets anxiogènes pour les dirigeants, assure-t-il. Nous militons pour qu'il puisse y avoir un report du remboursement du PGE. Nous appelons à faire de la solidarité bancaire internationale et nationale. Les PGE ont donné un bol d'air mais on attend des chiffres consolidés pour mesurer l'impact de la crise en termes de baisse de création de richesses. La présidente du tribunal de commerce de Montpellier, Nadine Baptiste, dit qu'aujourd'hui, il n'y a pas plus de sociétés en procédure que les années passées. Mais nous sommes à un moment charnière. »

« Sans que le moteur économique ne cale »

« L'économie a été mise sous perfusion, mais ce ne sont pas des cadeaux faits aux entreprises, lance-t-il. Le dispositif de l'activité partielle existait déjà et a été élargi pour éviter de détruire de l'emploi. Le PGE n'est pas une subvention mais un prêt. Et les fonds de solidarité viennent compenser des pertes d'activité pour des fermetures administratives. Il va falloir accepter la "dé-perfusion". C'est à dire ne pas se retrouver sur un effet ciseau complet. Il y a des secteurs d'activité à l'arrêt, nous voulons un phasage, une temporalité, et que les dispositifs de "dé-perfusion" soient au diapason de ces phases de réouverture. Il faut apprendre à vivre avec le Covid sans trop peser sur la dépense publique mais sans que le moteur économique ne cale. »

La crainte du patronat, c'est notamment que les capacités d'emprunt des entreprises soient restreintes en raison de bilans 2020 peu encourageants. « Il ne faut pas assécher les crédits, ne pas fermer les robinets », plaide Samuel Hervé en direction des banques.

Autre préconisation, en direction des chefs d'entreprises cette fois : que l'économique apprendre à vivre avec le sanitaire. Autrement dit, mettre en place le télétravail et les mobilités et faire évoluer les pratiques managériales en conséquence.

« Le Medef a mis en place un groupe de travail sur la "marque employeur" pour que les dirigeants d'entreprises repensent leur relation aux collaborateurs, car la crise a cristallisé certains sujets de management, souligne-t-il. Par ailleurs, avec la crise sanitaire, beaucoup de piliers de sont effondrés dans les entreprises et il faut en replanter de nouveaux. Le Medef a conclu un partenariat avec la chambre des professionnels du conseil de l'Occitanie pour les entreprises qui auraient besoin d'un diagnostic, d'un outil-boussole sur les différentes fonctions de l'entreprise, afin de se calibrer et de se donner des perspectives de développement. »

Simplicité (ou pas) des dispositifs de relance

Pour se relancer, les entreprises peuvent aussi tenter de bénéficier du plan de relance à 100 milliards d'euros annoncé par le gouvernement et déjà en partie déployé sur les territoires. Le président du Medef Hérault Montpellier loue notamment le volet cohésion sociale et la simplicité d'accès des dispositifs sur l'apprentissage et « un jeune un emploi » (octroyant une prime à l'employeur qui recrute un jeune résidant dans un quartier prioritaire de la politique de la ville).

Le patron des patron se félicite également de la baisse des impôts de production, mais regrette le manque de simplicité des dispositifs du volet transition écologique (principalement fléchés sur la rénovation énergétique des bâtiments de l'État et des collectivités territoriales) : « En l'état actuel des choses, les petites boîtes qui n'ont pas l'ingénierie en interne pour répondre aux appels à projets, continueront de ne pas répondre ».

Cécile Chaigneau

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