Menaces sanitaires et changement climatique : comment les serres confinées préservent les plants de vignes

Face aux menaces sanitaires et aux effets du changement climatique, l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV), implanté au Grau-du-Roi dans le Gard, intensifie son programme novateur de serres confinées pour garantir des plants de vignes sains. Quelque 12 millions d’euros vont être investis dans deux nouvelles serres photovoltaïques pour accélérer la production de matériel végétal.
L'Institut Français de la Vigne et du Vin, au Grau-du-Roi (Gard), a inauguré en 2022 son premier modèle novateur de serre hermétique destinée à préserver le patrimoine génétique viticole.
L'Institut Français de la Vigne et du Vin, au Grau-du-Roi (Gard), a inauguré en 2022 son premier modèle novateur de serre hermétique destinée à préserver le patrimoine génétique viticole. (Crédits : IFV)

En 2022, après une dizaine d'années de recherche, l'Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV), basé au Grau-du-Roi (Gard) inaugurait son premier modèle novateur de serre hermétique (1.500 m2) visant à préserver le patrimoine génétique viticole.

« La mission de l'IFV (18 unités, 160 collaborateurs dont une quarantaine au Grau-du-Roi, 18 millions d'euros de budget, NDLR) est d'accompagner les vignerons à affronter les diverses problématiques autour du changement climatique, de la transition agroécologique, ou encore des évolutions environnementales, rappelle Anastasia Rocque, directrice du centre de sélection à l'IFV.L'avenir de la viticulture se joue ici, 95% des plants de vignoble français sont d'ailleurs issus des sélections de l'Institut. L'installation de ces nouvelles serres semi-fermées répond à une mission d'intérêt général car elle garantit aux pépiniéristes la réception de plants de vigne sains. »

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Des serres « insect-proof »

Avec ce modèle de serre semi-fermée et hors sol, placée sous pression positive et disposant d'un système d'aération filtrée, le centre de sélection de l'Espiguette, qui sélectionne et conserve 600 variétés et quelque 2.000 clones, veut se prémunir de toute menace sanitaire, induite notamment par les effets du dérèglement climatique.

« De plus en plus de maladies, virus ou champignons sont présents dans le vignoble ou émergent, constate Anastasia Rocque. C'est le cas par exemple de la bactérie Xylella fastidiosa (connue aux Etats-Unis sous le nom de maladie de Pierce, NDLR) qui a notamment fait des dégâts majeurs dans les Pouilles en Italie. Transmise par les insectes qui se nourrissent de la sève brute des plantes, cette bactérie peut conduire au dépérissement total de la vigne. L'Union européenne en a d'ailleurs fait un sujet de préoccupation majeur. Le scarabée japonais, présent en Suisse, représente également une menace importante, classé comme organisme de quarantaine prioritaire au sein de l'UE. Les serres, isolées à l'aide d'un filet insect-proof, permettent de renforcer la protection des phases de conservation et de diffusion du matériel végétal viticole tout en s'affranchissant du recours à des produits phytosanitaires. »

Un ratio de production de 1 à 3 ans

Le centre de sélection a déjà confiné la moitié du matériel et l'installation d'une seconde serre (2.000 m2) est déjà prévue en 2025 pour pouvoir confiner l'ensemble de la production nationale. Coût de l'investissement : 500.000 euros (cofinancé par la Région Occitanie).

En 2023, l'expérimentation a essaimé en Gironde avec la construction d'une serre, puis en Champagne dans le cadre d'un projet fédérant trois régions (Bourgogne, Beaujolais et Champagne). Cette année, deux nouveaux projets sont dans les tuyaux : la construction de serres photovoltaïques sur les sites de l'Isle-sur-Tarn (production dès 2025) et de Nîmes (production dès 2026).

« Cette fois, l'objectif est d'accélérer notre capacité de production, en protégeant toujours les plants, bien sûr, mais avec une sécurité moindre (filets moins denses, NDLR), indique la directrice du centre de sélection de la vigne. Nous produisons aujourd'hui 600.000 plants annuellement. Or une production de matériel végétal en sol prend trois ans, contre une année en conduite hors sol. Ce nouveau protocole de démultiplication entraîne une remise à plat des itinéraires de cultures et de modes de conduite mais nous ambitionnons de commercialiser les premiers plants dès 2026. »

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Un investissement gagnant gagnant

Les deux nouvelles serres font l'objet d'un investissement de 12 millions d'euros, porté majoritairement par Amarenco, avec le soutien de la Région. L'énergéticien franco-irlandais a déjà financé la construction de serres maraichères à Eyrargues (Bouches-du-Rhône), dont il assure aussi la gestion et la maintenance.

« C'est du gagnant gagnant, se félicite Anastasia Rocque. Seuls, nous aurions été incapables d'investir dans cet outil technique qui répond réellement aux besoins de la filière, tant en termes de qualité que de quantité. »

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