Vendanges 2023 : en Languedoc-Roussillon, l’eau fait toute la différence

VITICULTURE (1/2) – La récolte viticole s’annonce contrastée en Languedoc-Roussillon. Dans les secteurs irrigués ou ayant bénéficié d’une bonne pluviométrie, les vignerons s’attendent à une jolie récolte en quantité et en qualité. Là où la pluie a fait défaut, le volume est amputé jusqu’à 50% et, dans certains secteurs, les souches n’ont pas survécu à cette sécheresse extrême.
Les vendanges ont commencé en Languedoc-Roussillon, avec une récolte attendue très diversifiée selon les territoires,probablement sinistrée dans les Pyrénées-Orientales où la vigne a essuyé une sécheresse sévère.
Les vendanges ont commencé en Languedoc-Roussillon, avec une récolte attendue très diversifiée selon les territoires,probablement sinistrée dans les Pyrénées-Orientales où la vigne a essuyé une sécheresse sévère. (Crédits : Michèle Trévoux)

Les premières estimations du service statistiques du ministère de l'Agriculture, établies début août, tablent sur une récolte en Languedoc-Roussillon qui pourrait dépasser celle de l'an dernier (12,6 millions d'hectolitres) et son niveau de moyenne quinquennale. Toutefois, la situation est très contrastée au sein de la région, selon que les vignes ont pu être irriguées ou bénéficier d'une bonne pluviométrie.

Le Gard tout comme l'ouest audois font partie des secteurs où les précipitations ont été suffisantes pour permettre un bon développement de la vigne.

« La récolte est plus jolie que celle de l'an dernier, indique Anthony Bafoil, président de la cave de Lédignan dans le Gard. Nous avons commencé à rentrer nos blancs à la mi-août. Les équilibres sont bons, les raisins sont très parfumés. Mais les températures caniculaires de ces derniers jours (du 20 au 23 août, NDLR) nous ont fait perdre du volume. Et il a fallu bousculer nos plannings de récolte car les raisins ont mûri en accéléré. »

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Récolte sinistrée en Roussillon

A l'inverse, dans les Pyrénées-Orientales où la sécheresse a atteint un niveau record, on s'attend à une récolte sinistrée qui ne devrait pas dépasser 400.000 hectolitres contre 550.000 hectolitres l'an dernier, ce qui était déjà une faible récolte. Qui plus est, les fortes chaleurs de ces derniers jours compliquent la tâche des vignerons et œnologues, confrontés à des blocages de maturité et des phénomènes de concentration.

« Ce sera un millésime compliqué, confie Laurent Duret, œnologue-consultant à l'ICV de Perpignan. Les raisins ont peu de jus, et il est difficile dans ces conditions d'élaborer des rosés. »

Le consultant constate cependant des différences flagrantes entre les zones plus humides ou irriguées et celles qui n'ont reçu que les maigres précipitations de l'année (150 mm depuis le démarrage de la végétation) : « Dans les Fenouillèdes, qui ont été plus arrosées, ou dans les secteurs irrigués, les volumes sont économiquement viables et on sauvegarde la maturité. L'irrigation contrôlée, c'est la survie du vignoble », estime-t-il.

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« C'est le désert »

Sur le littoral audois, la coopérative de Cap Leucate est également durement touchée par la sécheresse.

« Nous ne ferons qu'une demi-récolte, confie Lilian Copovi, le président de la coopérative. C'est catastrophique. Depuis janvier, nous n'avons reçu que 100 mm d'eau. C'est le désert... Les ceps meurent. Des parcelles entières ne seront pas vendangées. Je ne vais même plus voir mes vignes tellement c'est déprimant ! Beaucoup de coopérateurs ont arrêté de traiter car la vigne n'a pas poussé. On s'attend à 30% de perte de notre potentiel de production d'ici trois ans, car les gens baissent les bras. J'ai alerté nos élus, les pouvoirs publics, mais sans succès... On ne sait plus quoi faire. J'ai même évoqué la cessation de paiement lors d'une énième visite d'officiels la semaine dernière. »

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L'eau, un enjeu politique

Président des Vignerons Coopérateurs d'Occitanie, Ludovic Roux, partage les inquiétudes de ses collègues présidents de cave : « Je ne suis pas sûr qu'on arrive au volume de récolte annoncé par les services de l'Etat. La sécheresse terrible qui sévit cette année sur une grande partie de notre territoire va amputer une récolte qui pourtant s'annonçait belle. Le Gard semble tirer son épingle du jeu, mais attention, la récolte n'est pas encore en cave. Les autres départements sont très impactés par le manque d'eau ».

« Ce qui est nouveau cette année, c'est la sécheresse hivernale, souligne-t-il avec force. Nous étions déjà en déficit hydrique au début du cycle de la vigne. C'est du jamais vu à un tel niveau. Et on ne sait pas comment la vigne va réagir dans les années futures. L'eau va être un sujet central des prochaines années. La vigne est une plante peu gourmande en eau, et pourtant, il y a des ceps qui meurent faute d'une alimentation hydrique suffisante. L'enjeu est politique. Veut-on encore faire de l'agriculture sur notre territoire ? C'est la question urgente à laquelle il va falloir trouver très rapidement une réponse ».

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